vendredi 21 février 2025

Dues illes

Somiàvem dues illes,
de tinta i de paper.
L'una era de novel·la
i l'altra de poemes.

Entre les dues illes,
un mar d'interrogants.
La bonança de l'aigua,
la sal de la inquietud.

Somiarem dues illes,
de fred i de calor
les nostres mans inquietes
escrivint amb plaer.

Vaixells de mots

El ritme de la llengua.
Dibuixos complicats.
Els joncs venen de l'est 
amb veles de negror.

Mes la llengua parlada,
el moviment dels llavis
i la gola profunda
són vent de llibertat.

El signe és arbitrari
que voga d'est en oest.
La paraula és un buc
carregat de cançons.

jeudi 20 février 2025

A l'escorxador

A dalt de la ciutat,
cap a Vic, als afores,
hi ha un escorxador,
on hi conec algú.

Dinant de poca cosa,
a deshora, amb passió,
hi descobreix un món
que ben pocs coneixem.

Seixanta parts del porc,
el pa de cada dia,
l'ofrena de sa feina
als ventres del país.

mercredi 19 février 2025

Onze lletres roges

J'ai mis un bonnet rouge
au vieux dictionnaire.
                    Victor Hugo

Parlaré de la lluita
dels veïns del Maresme
per protegir-ne els camps
cobejats pels potents.

És una lluita afable,
constant i fabulosa.
Contra les constructores
deslliuren la paraula.

La paraula de tots,
els mots de cadascú.
Venen amb carmanyoles
plenes de verbs i girs.

En fan un diccionari
per renovar-ne el lèxic.
Tanta gent és esclava
dels discursos ambients.

La solidaritat
no és paraula vana.
Són onze lletres roges
per començar la lluita.






lundi 17 février 2025

Comme en lévitation

À Thierry & Élodie

Comme en lévitation,
le livre de l'amant
s'élève et puis se colle
au livre de l'aimée. 

Les couleurs se mélangent
et les lettres se parlent.
Que de charivari
sur mes planches de bois.

Petite bibliothèque
où dorment mes amis
dans l'attente des doigts
qui les verront s'ouvrir.



dimanche 16 février 2025

Smalltown boy

Charleville, ville imbécile.
                                   Rimbaud

Il voulait une main,
caleuse dans la sienne,
la poignée de son père,
mais il eut des billets.

De vieux billets froissés
pour fuir de cette ville,
la honte des parents
et les coups des copains.

Il voulait un regard
dans ses yeux qui pleuraient
mais ce regard buvait
la télé du salon.



Rêve digital

J'ai rêvé de tes doigts
tes doigts sur une page,
tes doigts qui guideraient
ma main sur le poème.

Leur finesse et leur force,
la douceur de ta voix,
l'empreinte de tes doigts
courant sur le papier.

Mes mots naissent des tiens,
des détails que tu cueilles,
de ta colère aussi
devant tant d'injustice.

Joc de temps

Vora el llibre mort
farcit d'homes il⋅lustres
i de l'apunt vivaç,

una tassa petita
i la marca perenne
del cafè degustat
fa una estona llarga.

Joc de temps oposats
que signa la presència
un diumenge d'hivern
d'una poeta viva.




Una platja de veus

A la Maria i en Jaume, de Binomi

De les veus tan properes
heu fet granets de sorra
i cada plana vostra
n'esdevé una platja.

Gràcies per tant d'amor
i de dedicació,
al servei de la llengua
i de tots els mainatges.

Contre les promoteurs

C'est une tente blanche
pour y monter la garde.
On mange sur le pouce
en restant vigilant.

Le peuple s'y relaie 
pour tenir à l'écart 
les viles pelleteuses
et les excavatrices.

Cela fait bien des mois
que, la nuit et le jour,
le village fait corps
contre les promoteurs.


samedi 15 février 2025

Peine

Il était le dernier,
le petit des derniers,
complice de mon père
dans les jeunes années.

Puis il s'en fut très loin
et revenait parfois,
la Belle Américaine
roulant dans Saint-Bauzille.

Ingénieur agronome,
luttant contre la faim,
puis l'homme de Carnon
affrontant la vieillesse.

Moi je pense à la peine
de l'un de ses grands fils,
aujourd'hui retraité,
mon cher contemporain.

Semaine poétique

Du lycée à l'école,
j'ai aimé ces trois jours 
créant une semaine
d'un humble sablier.

Un sablier de vers,
de voix et de sourires,
sachant guider le temps
avec deux ou trois riens.

La beauté intérieure 
derrière les onguents
et le chœur des enfants 
faisant leur carnaval.

Gravacions

En una sala blanca,
al fons del passadís,
plena d'objectes rars
i de taules petites,

han vingut mags d'Orients
a gravar-nos la veu,
amb micros silenciosos
i un ordinador.

Ens hem quedat dempeus,
disfressats i bonics,
per treure del Vernet
tota la poesia.

vendredi 14 février 2025

François l'oublié

Poète de Paris,
des rues et des faubourgs,
c'est François l'oublié,
le délicieux Coppée.

Que seraient Saint-Germain
et les jolies mercières
sans le vers parnassien
de l'archiviste né ?

Poète des paris,
qui jamais ne cessa
d'enjoliver la vie
avant de la quitter.

Les non-dits de l'amour

Les non-dits de l'amour,
ces paroles exquises
que l'on garde pour soi

et que la nuit libère
en petits mots discrets
alignés sagement
sur un petit carnet.

Le mien n'a pas de plume
et mes doigts y pianotent
jusqu'à potron-jaquet.

Journal poétique

J'ai fait de l'insomnie 
un curieux encrier
où je trempe ma plume
par crainte de l'oubli.

Oubli de cet amour
que prodigue le monde
dans chacun des détails
cueillis dans la journée.

J'écris en vers petits
la traversée des jours
et toutes les rencontres 
que le hasard fait naître.

Des pièces cadencées
sur trois ou quatre strophes,
un précieux métronome
pour rythmer mes non-nuits.

Espace-temps

À Marion et ses élèves

La salle s'est fermée
sur le silence froid
d'une nuit de jeudi.

Et pourtant voici peu
elle a ouvert ses portes
à la voix de poètes.

Poètes de deux jours,
traçant en lettres bleues
des vers sur la Beauté.

Puis les lisant tout haut
à la salle ébahie
devant tant de beauté.

Noblesse des poèmes
venus du plus profond
de leur âme exaltée.

Comunió

Al Pablo i a la gent del Casal

Lectures en veu alta
a l'hora del sopar.
Llumetes de color 
al mig de la foscor.

Copes de vi discret
que surten del vermell
de la paret del fons
per guiar els poetes.

La sala no diu res.
Tots són catalanistes
combregant a la llengua
amb calzes de vi negre.

À l'heure du coucher

Elle a appris ma langue
en lisant des romans
sur un canapé jaune
à l'heure du coucher.

Des pages par dizaines
sur un papier jauni
griffé de mille mots
qui soudain se dévoilent

et acquièrent un sens
qu'elle croyait interdit
quand elle ouvrait son livre
à l'heure du coucher.

L'Étranger

C'est un livre petit,
tout empreint de froideur
qui conduit à la Veuve
un homme sans passion.

Un meurtre sans raison
et la mort de la mère
laissant Meursault tout seul
sans larmes dans les yeux.

Un monument immense
qui tient entre les doigts
pour te confier ma langue
sous le feu de tes yeux.

jeudi 13 février 2025

Poëme, poème, pot aime

Mais quel est ce tréma
qui disparut soudain
au profit d'un accent
au caractère grave.

Refusant le tranchant
de l'aigu dominant
et la circonspection
du circonflexe austère,

jusqu'en soixante-dix-huit
il offrit aux écrits
ses deux yeux accollés
ouverts au vaste monde

Et cassant le poème
en deux syllabes pleines,
il aimait dans son pot
tremper son caractère.

Poëme évaporé 
et poème qui glisse,
mes deux énamourés
sans qui je n'écrirai.

Un peu de ma passion

Je songe à l'atelier 
que je ferai demain
dans le bâtiment B
d'un lycée de ma ville.

Nous écrirons ensemble 
sur de petits cahiers
les fruits d'une passion
cherchant à s'exprimer.

Je ne sais pas encore
quels seront les poèmes
qui naîtront de l'effort 
des poètes d'un jour.

D'un jour, peut-être deux,
ou bien toute une vie,
tant je vois dans leurs yeux
une lueur nouvelle.

Sur le formica blanc,
attablées deux à deux,
les élèves diront
au monde ce qu'elles sont.

En paroles pudiques
sur un trait de couleur
ou sur leur noble mère
qui les aime toujours.

Le cahier refermé
et ses mots envolés,
je sens qu'elles garderont
un peu de ma passion.

Amor vençut

Llegiré al matí
els poemes d'amor 
d'un home de París
fugint la burgesia.

Una lletra petita
caminant lentament
per les planes immenses
d'una llibreta blanca.

L'absència de l'amada,
la seva mort sobtada,
la ferma voluntat
de prolongar els dies

de l'amor sense fre
viscut a la frontera
de les terres en guerra
per un bocí de pa.

Els cossos despullats
cridant el seu plaer
dins la nit vermellenca 
del foc dels enemics.

Retrobaré potser,
entre la lletra negra,
la cendra vermellosa
del seu amor vençut.

Saucisse familiale

À mon frère Alain, avec amour 

Percé de deux brochettes
d'acier inoxydable,
c'est un mets délicieux
que prépare mon frère.

La saucisse est épaisse
qui grille lentement,
pendant que sur la table
on prend l'apéritif.

La façon de mon père
et son goût du poivré,
la flamme de mon frère,
sa générosité.

Ah le joli repas
qui pétille gaiement,
ma mère devisant
avec ses petits-fils.

Que passent les semaines,
les mois et les années,
et que toujours revienne
leur saucisse grillée.

mercredi 12 février 2025

El castell de les claus

És el joc de les claus
que surt de la infantesa
per obrir al passat
la nena de Palau.

Una hora deliciosa
al mig d'un castell vell
amb un cofre de roure
omplert de robins nous.



Un aniversari

Espelmes de vellut
quan l'amistat fa anys.
La boira matinera
es fa vel de cotó.

Són hores delicioses
sota el cel de blancor.
S'escamparà la broma
i dansaran els camps.

Ja penso en els cafès,
les copes de vi bo,
i fins a la cervesa
que compartirem prest.

Vacances de febrer.

Vacances de febrer,
el mes del carnaval.
Sortireu tots vestits
amb pijama de seda.

Despertareu els pares
amb trompeta de coure
i per l'espertinar
menjareu bunyols freds.

Chien sans collier

C'est une douleur sourde
qui peine à s'exprimer,
la douleur d'un vieux père
pour un chien sans collier.

Et la distance croît
au fil de l'acier doux
des petits trains glacés
qui relient leurs deux villes.

Le père n'en dort pas,
ça n'a pas d'importance,
sa vie déjà s'en va,
mais qu'en est-il du fils ?

Il a mordu la vie,
comme un chien sans collier,
déchirant l'existence
de tendres rejetons.

Et le voilà paré
de vains colifichets
qui sont autant de chaînes
entravant son parcours.

Il délaisse l'école
et ne sait où aller
rejetant sur les autres
son dégoût de l'effort.

Il vante le sans-fil
des objets connectés
alors qu'ils sont la laisse
qui lui sert de collier.

Appartement petit

C'est un appartement petit
dans une ville froide,
ouvert aux quatre vents
quand l'ombre l'envahit.

Mais c'est un lieu coquet
où les draps sont de pages,
les meubles de reliures
et les cloisons d'idées.

La pensée y est reine
qui sautille et vous nargue,
étrangère au confort
de tant d'écervelés.

mardi 11 février 2025

Sincérité

Aux élèves d'esthétique
du lycée Léon Blum

C'est une salle blanche
où poussent des tulipes.
Une sève nouvelle
anime leurs pétales.

Ces fleurs ont un prénom,
un cœur, une passion,
et chacune d'entre elles
compose mille mots.

Des mots d'amour profond
ou de douleur cachée.
La vraie sincérité
que seuls les vers dévoilent.

Quatre couleurs

Un arc-en-ciel petit
enfermé dans un tube
pour régaler les feuilles 
d'une vie à écrire.

Ah le bel instrument
qui tient dans votre main,
pour diriger l'orchestre
des journées à venir.

J'en ai plein mon tiroir
qui attendent leur heure
en réservant leur encre
pour en faire mémoire.

La mémoire des jours
que nous vivons céans,
en rêvant de l'azur
et de ses arcs-en-ciel.

Poète de la vie

À Romaric

Poète de l'instant 
et des mots qui s'envolent,
il délaisse la rime
pour le combat des vers.

Il écrit pour la vie
comme un remerciement
à la lutte des autres
qui guide son parcours.

Poète d'un moment
et de toute une vie,
il confie au lycée
sa plume et ses envies.

Un atelier poétique

Aux élèves du lycée Blum
que je ne connais pas encore.

L'atelier d'aujourd'hui
se lève avec le jour.
Visages inconnus
d'intense humanité.

C'est au sud du Moulin,
dans mon quartier d'enfance,
que je partagerai
un peu de ma passion.

L'amour des inflexions
et de l'accent chantant.
Le rythme lancinant
des pas sur le gravier.

Un infini respect
pour chacun des élèves.
Et une action de grâce
pour leur cœur de poète.

Volets clos

J'ai fermé les volets
pour chercher dans les coins
des lambeaux de lumière.

Écouter le son grave
de mon cœur aux aguets
et penser à tes pas.

Sur les galets glacés
de Cerbère l'hiver
en direction du sud.

lundi 10 février 2025

Langue neuve

C'est une langue neuve
qui unit nos passions.
Les battements des lèvres
disent plus que les mots.

On parle de la presse
et de la vie d'ailleurs
mais nos cœurs voguent loin,
plus loin que le midi.

L'écran est un miroir
ou une mer étale
où nous aimons voguer
sans crainte de nous perdre.

Un teatret

És un teatret d'ombres
on bateguen passions,
com un mirall de veus
brillant dins la foscor.

Amor a l'escenari
emocionant el públic,
rere cada paraula
i el silenci dels llavis.

És un projecte nou
que vol salvar fronteres,
d'un salt de veus salvatges
buscant el seu recer.

Surprise inattendue

Des arbres sur les voies
et le matin se lève,
traçant sur la frontière
un trait de glèbe brune.

Tu es partie si tôt
la maison t'attendait
préparant le café,
le pain, la marmelade.

Pourtant nulle tristesse
sinon la joie intime
d'avoir uni nos mains
deux jours de février.

Surprise inattendue
que le timbre soudain
annonçant ta venue
d'un doigt qui souriait.

Et la pâte a levé
dans la tiédeur du soir,
rappelant les promesses
d'un jour d'il y a cinq ans.

Tu roules dans le noir,
esquivant les barrages
de ces hommes de bien
sans qui nous ne serions.

Nulla dies sine linea

Pas un jour sans tracer
une ligne au cordeau,
la traînée d'un pinceau,
un vers ou une phrase.

Le mouvement dit tout
de nos pas sur la terre.
Sûreté de la main
et des yeux qui chavirent.

Poètes sans poème,
romanciers sans roman.
Il est des yeux qui disent
sans pourtant rien garder.

Pas un jour sans souffler
de son haleine tiède
les bougies d'une fête
qui vient de commencer.

jeudi 6 février 2025

Bleuissantes Albères

   Que són de blaves les Alberes.
                     Gumersind Gomila

La masse des Albères
veille sur mes écrits.
Elle est mon Dieu caché,
mon jansénisme vain.

Je m'y tourne souvent
en ouvrant mes volets,
certain d'y retrouver 
l'encre qui me manquait.

La masse des Albères,
le silence des bois,
et le vert bleuissant
dans la froideur d'hiver.

Planter

És un planter de dies,
de violes i de flors.
La promesa serena
dels amants de febrer.

En un poble petit
de l'altiplà central,
descarten Valentí
per celebrar l'amor.

Cap anell de platí
ni perfums de París.
Les grapes de metall
uneixen llurs escrits.

Semis de futur

Dans tes mains le semis
d'agrafes argentées.
Le paraphe des dieux
sur le pacte non dit.

Silence des rues claires
par où nous descendions
en quittant le bazar,
nous tenant par la main.

Les langues alternaient
dans la froideur d'hiver,
nos cœurs à l'unisson
et le futur ouvert.

L'ofrena de l'Albera

I vingueren les hores
amb uns clips de color,
les grapes platejades,
els amants de bracet.

Silenci del carrers,
en baixar de la Xina.
El cel eren paraules,
el sòl batecs de cor. 

Un dia regalat
per l'atzar orientat.
L'ofrena de l'Albera
als escriptors units.

mardi 4 février 2025

Taronges dels amics

 A la Nathalie i l'Édouard

Taronges dels amics,
taronges d'amistat.
Unes boles rodones
com planetes de goig.

És un record subtil
d'un dinar a llur casa.
Un regal delicat
per prolongar el dia.

Taronges dels amics,
la llum de la butxaca
que em guia per la nit
agraït i feliç.



lundi 3 février 2025

Floretes del til⋅ler

Floretes del til⋅ler,
el somni de Sant Joan.
La veu de l'estimada
olorant llur perfum.

En aclucar els ulls,
ja veig del bon Miracle
el til⋅ler centenari
que nos convoca tots.

Catalans de l'Albera
i gent de l'altiplà
hi farem un aplec
per començar l'estiu. 














© Roser Blàzquez

Tempus fugit

És temps d'olorar la calma.
                Rosa Miró Pons

Toquen les hores.
Un, dos, tres.
És temps de sol
i de vent fred.

Ni un minut més
al vell rellotge.
Olor de calma
i de camèlia.

Toquen les hores
amb els seus quarts.
Un, dos i res.
Ja fuig el temps. 

Carrer de les Camèlies

He deixat els pinsans
de Montescot la bella
per a guaitar camèlies
al poble de Palau.

I m'he fet una via
de llambordes petites
dedicada a les flors
que m'inspiren avui.

De Mercè Rodoreda
són el record perenne
i de mon estimada
el somriure vivaç.



Camélias du jardin

Rose sans ambroisie 
et lis sans majesté.
     Honoré de Balzac

J'aime cette noblesse
qui s'ouvre sans mentir,
la blancheur des pétales
se mêlant au sang vif.

Camélias du jardin,
silencieux et loquaces,
portant en février
les couleurs du printemps.

Ils jouxtent mon entrée
en gardiens nonchalants.
Leurs atours dodelinent
au gré des vents coulis.

En avares somptueux,
ils gardent sous leurs feuilles
quelques bourgeons pommés
pour m'enchanter matin.

Ainsi au fil des jours
de ce mois écourté,
je les verrai fleurir
et refleurir encore.

Camélias du jardin,
mes nobles sans le sou,
demeurez près de moi
et n'en soufflez pas mot.













Albera i Canigó

Albera i Canigó,
els meus punts cardinals,
amb fileres de cases
blanques com la nevada.

Al mig de la planura
un òmfal verd de vinyes
i la labor dels homes
preparant la tardor.

Mirant cap a la mar,
li donen llur frescor
amb un amor de segles
que mai correspondrà.











Fidelitat insigne

Què seríem sense ell,
el rellotge dels dies,
amb agulles de sal
i cel de pau serena?

Quan comença el matí,
se'm desfà la distància.
i rebo al Rosselló
les hores menorquines.

Fidelitat insigne,
el preu de l'amistat.
Els ulls de Joan Verger
amb la remor del mar. 














© Joan Verger

Escala de foscor

Escala de foscor
amb l'esperança a baix.
La llum de la placeta
i les veus dels veïns.

Són pedres ancestrals,
els confidents glaçats
dels campaners del poble
ritmant les hores llargues.

Uns esglaons estrets
per milers de sabates
pujant a veure el cel
de la comarca entera.














© Roser Blàzquez

dimanche 2 février 2025

Campanar de Babel

Entre el cel i la terra,
una estrella de pedres,
amb cordes i filferro.

Solidesa aparent,
campanar de Babel,
implorant el Senyor.

Entre la terra i el cel,
la blavor del fred viu
i uns ulls de rosada.











© Roser Blàzquez

vendredi 31 janvier 2025

Versos agraïts

Llegint Mn Josep Ruaix

M'agrada el ritme lent
dels versos d'art major
i la frescor plaent
dels versos d'art menor.

Llegint en Josep Ruaix,
els cullo tots plegats,
tot escoltant a fora
uns refilets d'ocell.

Són versos agraïts
a la vida que corre
i al bon Jesucrist
que l'anima a escriure.



Bon ApPEtit

Des soleils en petit
de farine et de lait
pour en faire un grand tas
quand s'approche la fête.

La fête des parents,
de notre association.
La fête des enfants
qui s'en régaleront.

La générosité
et l'inventivité
se donnent rendez-vous
à Arrels vendredi.

Si le week-end commence,
ne fuyez pas déjà,
partagez un moment
en dégustant nos crêpes !




















© Mélanie (APE Arrels-Vernet)

Conversa filosòfica

A en Joan que ben prest
farà anys.

Hem deixat els articles
darrere les pantalles
per parlar en francès
d'una passió comuna.

El llenguatge i les llengües,
com fruits d'humanitat,
amb la calor dels sons
sempre tan diferents.

Sota la llum dels mots,
la força estructural.
La forma i la sintaxis
esquelet de conversa.

No conec la meitat
de les llengües d'en Joan 
mes amb ell compartesc
el gust per descobrir-les.

Sal i passió

Un cafetó cremant
damunt de l'hule groc
i la casa en silenci 
que s'està despertant.

Terrisses estimades,
mobles de roure fosc,
els passos de la mare
amb sa veu tan propera.

La calor d'una tassa
és una invitació
a treure de la vida
la sal i la passió.

Cartes au trésor

Des cartes au trésor
pour sillonner les routes
et labourer les terres
en quête de pépites 

Le fumet d'un poisson,
des champignons farcis,
une poêlée de riz
à l'odeur volatile.

De petits riens exquis,
sans valeur matérielle
mais rendant à la vie
le goût de l'essentiel.

jeudi 30 janvier 2025

Rêves

J'ai rêvé de ta voix
courant sur les draps clairs.
Un souffle de voyelles
sans aucune consonne.

J'ai rêvé de ta main
passant sur le bois blanc.
Un glissement discret
sans aucune anicroche.

J'ai rêvé de tes cils
me fermant à ton cœur.
Une barrière tendre
pour me faire rêver.

Pages ronéotées

J'aime trouver des livres
au fond des secrétaires,
brisés par les années
de chaleurs estivales.

Des livres sans fierté,
reliés hâtivement
et qui gardent encore
le prix de l'inédit.

Manuels de grammaire,
recueils de vieux journaux
qui furent en leur temps
d'une étrange fraîcheur.

Matinada ventada

Matinada ventada,
un ventolí lleuger.
Salutació de mots
i d'ulls oberts al món.

Un regal de les set,
preciós i generós
per despertar-me els versos
abans del sol del dia.

Matinada ventada,
la calor d'un somriure
i la fe en la vida
que neix cada matí.

mardi 28 janvier 2025

Saute-mouton

C'est à saute-mouton
que je joue en rêvant,
quand l'insomnie me vole
mes heures d'inconscience.

Je vais de dos en dos,
de parole en parole,
empruntant aux amis
les mots de la vraie vie.

Et quand mes forces cèdent,
je demande à la nuit
d'interrompre le jeu
jusqu'à potron-jacquet.

Dos poemes petits

Dos poemes petits,
com uns grans de misèria
per la platja dels mots
de la llengua admirada.

La son em porta al son
mes no vull aclucar
els meus ulls de poeta
en versos d'art menor.

Dos poemes petits
com un mar fent bonança,
a l'hora dels forners
i del vent de llevant.

L'amant dels mots

   El mundo es ancho y ajeno.
                           Ciro Alegría

Soc amant de paraules,
inventor de desitjos,
sorgits d'entre les pedres
d'un diccionari viu.

La meva llengua és doble,
segura mes incerta.
Anhela descobrir
els mots de l'altre món.

El món ample i aliè
dels catalans del sud,
admirats des del nord
amb serenor i força.

Saltar i parar

Quan dorms d'una tirada,
m'estimo més jugar
a saltar i parar
amb esquenes d'insomni.

És un joc esperat
sobre les tres en punt,
quan dormen les campanes
amb el bon capellà.

De salts a saltirons
em porten les paraules
que un ventijol amic
m'ajuda a enlairar.

Escletxa

He donat a la nit
cinc rals per adormir-me
i la nit m'ha tornat
vint rals de vent d'insomni.

És el vent de l'amor,
dels pensaments furtius,
de la veu de l'amada
que sap trobar l'escletxa.

Respiració serena
de la meva companya
que calla i diu la vida
amb batecs silenciosos.

lundi 27 janvier 2025

Les voisines

Elles ont quitté leur terre
et leur lointain village
pour porter à la ville
le fruit de leur passion.

Voisines dans le cœur
d'un citadin ancien
amoureux de leurs champs
jusqu'à les transposer

dans des romans ruraux
au parler sonnant vrai
sans crainte de violer
l'ordre et la bienséance.

Feuilletant des revues
et les livres d'Agnès,
en très peu d'expressions
elles ont offert la vie.

La vie des pauvres gens
qui désertent l'écrit
mais tracent de leur sang
la vigueur des récits.

Une note rapide

Il y avait dans ta main
un mot écrit en bleu.
Une note rapide
à ne pas oublier.

Et puis j'ai vu comment
le temps faisait son œuvre
et l'encre pâlissait
au fil de ta journée.

Alors j'ai désiré
voir gravée dans mes yeux
cette note rapide
qui ouvrait notre année.

Gràcies

Petit, com insolent,
un mot entremaliat
vingut dels temps antics.

Almoina de la mà,
petxina calorosa
guiant el pelegrí.

La dolçor de la saba,
l'agudesa dels ulls
que resen sense Déu.

L'agraïment sobtat
de la boca sencera
en l'alè retingut.

És un bell homenatge
com un comiat serè
que obriria el dia.

jeudi 23 janvier 2025

Llambordes de paper

Llambordes de paper,
de cartró i de tinta,
els teus llibres bonics,
calçada de lectures.

Un quitrà de dolçor
que acaricien els dits.
Pedretes del camí,
els mots que collirem.

Un viatge per la ment
i els escrits estimats.
Llambordes de paper,
calçada del meu cor.

mardi 21 janvier 2025

Le baiser des voyelles

Quæritis [...] unde meus ueniat mollis in ore liber.
                                                             Properce


Et la bouche a molli,
sous les vers de Properce,
descellant de l'aimée
les lèvres desséchées.

Magie des élégies
venues des temps anciens
et que le pli d'un livre
ravive en un instant.

Tu songeais à la nuit,
oublieuse des livres,
et cherchant dans ton sac
la route de tes rêves,

quand le rythme ternaire
d'un homme de l'Ombrie
t'a tirée de tes rêves
pour écrire à ton tour.

Et l'eau t'a envahie,
lustrale et bienfaitrice,
pour caresser tes lèvres
d'un étrange baiser.

Le baiser des voyelles
puisées dans l'encrier
et que le temps allonge
pour être à tes côtés.



Per la finestra

Aut si es dura, nega;
sin es non dura, uenito.
                       Properci

Amb son balcó de ferro
com un bell pentagrama,
la finestra beu tinta
de l'estany del parc vell.

I la verdor de l'aigua
davant de sa bellesa
deixa que s'hi emmirallin
les lleixes dels poetes.

Al costat d'una carpa,
veureu brillar Ovidi
amb son veí Properci
navegant cap al sud.



Fullaraca

Han perdut la verdor
per mesclar-se amb la terra,
les fulletes del roure
s'han tornat fullaraca.

I cadascuna d'ella
ha deixat son orgull
per donar al sòl nu
la força de l'adob.

Fullaraca bonica
tens color de les pàgines.
Deixa que l'any nounat
n'escrigui la llegenda.



Désinvestiture

     Qualis artifex pereo.
                           Néron

Il jetait ses crayons
à la foule en délire
après avoir signé
des décrets d'infamie.

Un César en carton
saignant ses affidés
pour se croire éternel
avant quatre-vingts ans.

Moi je songe au regard
d'un enfant mexicain
rêvant d'une Amérique
qu'il bâtirait demain.

Lucarne

J'aime cette lucarne
sur ma soupente haute.
Elle extrait de la nuit
la lumière en silence 

Et la chambre se peuple 
de bienveillantes ombres
m'invitant à écrire
jusqu'à potron-minet.

C'est un vasistas froid
que jamais je ne touche
mais qui veille toujours
sur mes heures de veille.

Étranges insomnies
depuis mes vingt-cinq ans,
sans qui je n'écrirais
jamais plus de vingt vers.

Ma lucarne jolie
est un rectangle blanc,
une page à venir
pour mes lecteurs d'un jour.

Quête buissonnière

Les mains se sont ouvertes
aux plaisirs de la nuit :
les pensées vagabondes
et l'esprit buissonnier.

La liberté soudaine
de perdre ses racines
et d'en inventer d'autres
au gré de ses lectures 

Un parc de Barcelone,
des enfants près d'un pont,
un restaurant chilien
qui ouvre à Budapest.

La nuit est de silence,
on la croit insipide,
asservie au besoin
de détendre le corps.

Moi j'en fais un tremplin
pour connaître le monde
et soulever le toit
des foyers inconnus.

Ma quête buissonnière
n'est pas expansionniste.
Il me suffit de peu
pour rêver à l'envi.

Gran disc solar

És un gran disc solar
que surt de la foscor,
com un calaix de sastre
de mar i de muntanya.

Una pizza cremant
de tonyina i pernil,
entre tomàquet líquid
i formatge ratllat.

Es menja compartit
aquest gran disc de llum
per celebrar la sort
de conviure a la nit.

Oxygène

J'ai marché dans la nuit 
sans quitter ma maison.
Les rues étaient de lune
et les murs de vent frais.

J'ai soulevé le toit
qui pesait sur mes rêves
et j'ai laissé venir
la senteur des bois nus.

L'oxygène des vers
que l'on croyait perdu
et que des mots amis
convoquent à l'envi.

lundi 20 janvier 2025

Nuit et jour

Et la nuit s'est tendue
de poussière et de cuir.

Elle a tiré du jour
l'épaisse courtepointe,

toute brodée de peine
et d'incidents menus,

avant que de sourire
à ce croissant de lune

qui lui tient de support
à l'heure du coucher.

Demain l'effacera
sous les pas de l'aurore

qui la découvrira
de ses doigts de vermeil.

La paix alors viendra
et le jour tremblera.

Plaisirs simples

Je me plais à rêver
de jours de plaisirs simples.
Le crépitement vif
de l'âtre qui ronronne.

Le froissement des draps
et les portes qui claquent.
Un crépuscule clair
qui tarde à s'imposer.

L'allongement des jours,
semaine après semaine,
et l'odeur du pain frais
qu'on rompt en déjeunant.

Le bonheur est ainsi,
dans des petits paquets,
de lavande odorante
et de mots doux mêlés.

Un enllaç eternal

És el compàs de l'ànima
que torna a cadascú,
al mig de la ballada,
el sentit de la vida.

Almorratxa a la mà,
amb un barret de copa,
el casat repeteix
la promesa ancestral.

I vestida de blanc,
la casada li torna,
amb un gest de la mà,
un enllaç eternal.


Un plec de paper

És un plec de paper,
una arruga invisible
que només tu i jo
veiem entre les línies.

La marca del passat
que acaricia el present
amb lectures plaents
entre el negre i el blanc.

És com una pestanya
caient de l'ull encès
per tornar als teus dies
la llum dels anys de goig.

Peine

C'est la peine soudaine, 
la grisaille d'un jour 
qui naquit sous la brume.

La robe de pénombre
des vaches dans les prés
qui paissent et puis s'en vont.

La tristesse du monde
le long des chemins vides 
et des bois oubliés.

Porta

És una porta oberta,
una escletxa de llum,
d'oxígen i silenci.

Un pas entre nosaltres,
un pont de mots i girs
entre les nostres llengües.

És una porta d'aire,
un rectangle de cel,
de respecte i d'amor.

Plumes

J'ai délaissé ma plume
pour la plume des autres,
je me suis abreuvé
de leurs vers séduisants.

J'en ai fait des versets
dans leur langue ou la mienne,
soignant pour chacun d'eux
la forme et puis le fond.

Et me voilà transi
à la fin de janvier,
encore tout rouillé
à l'heure du poème.

Je sens s'ouvrir des mois
aux journées généreuses
qui me feront aller
de pair avec ceux-ci.

Ces vers d'autres poètes
sans qui les miens seraient
un gravillon tiédi
à l'écart du chemin.

Lundi férié

C'est un lundi férié
où l'on paresse tard.
Les commerces fermés,
les rues sont silencieuses.

Mais les maisons s'animent
de bruits insoupçonnés.
Le grave d'un coussin
que l'on bat au lever,

la sonnaille aigrelette
d'une cuillère fine
contre la tasse vide
que son évier appelle.

C'est l'heure sans projet.
L'on y baille sans honte,
en rêvant d'un midi
au soleil de juillet.

Si le froid est partout,
se glissant sous les portes,
l'amour est dans les cœurs
qui rêvent d'un ailleurs.

Dia de Sant Sebastià

De sant Sebastià el dia,
blanquinós i superb.
La fredor de la boira,
la buidor dels carrers.

A les fosques l'església,
amb repós merescut,
després de la vetllada
amb els balls populars.

Onejaven banderes
i barrets d'alta copa
amb la finor del cant
de tres corals unides.

dimanche 19 janvier 2025

Le rythme d'une année

        Aux habitants de Moià

Les siècles pour la mer,
le sable d'une plage.
L'immensité lointaine
qu'on ne peut maîtriser.

Mais le rythme d'un an,
l'empreinte des semailles
qui emplit les greniers
au terme de l'été.

Les fêtes villageoises
à la Saint-Sébastien.
Les danses en costume
et le bruit des grelots.

Le peuple rassemblé
dans la nef de l'église,
célébrant cinquante ans
de ferveur en commun.

À l'heure du dîner,
quand l'église se vide,
je pense à cette année
que la danse rappelle

et je vois dans les yeux
des vieillards chapeautés
le regard des enfants
qu'ils furent autrefois.

Derrière moi vagit
un nouveau-né qui veut
prendre sa part à l'acte
dont il perçoit le bruit.

La rumeur insolente
à ses oreilles neuves
qui l'inscrit dans la ville
et le prépare aux actes

d'un peuple lancinant
comme la vague blonde
qui lèche le rivage
sans s'en aller jamais.

J'aime cette cité
et ses voisins paisibles
qui savent me donner
le rythme d'une année.