vendredi 30 juin 2023

Un livre neuf

Entrer dans un livre neuf, inattendu,
c'est pousser du pied une motte revêche
et découvrir sous elle, un désordre qui vit. 

La terre s'ébouriffe qui bruisse de fourmis.
Des gendarmes, des cloportes, un lombric
interminable font le Jardin des délices

d'un Jérôme Bosch désœuvré. Page à page,
on grandit ou, du moins, on devient un autre,
cherchant derrière l'encre la vie qui nous sourit.

Offre-toi des jacinthes pour nourrir ton âme.

Offre-toi des jacinthes pour nourrir ton âme.
Le conseil est persan, qui introduit un livre
sans table des matières ni index.

Des jacinthes de mots, à la Mandiargues,
de celles qui font trébucher l'alexandrin,
en en brisant la tige pour retirer un pied.

Le pain rassasie le marcheur, l'eau fraîche
de la cruche étanche sa soif, mais, sans fleur,
la marche perd tout sens et le livre se clôt.


jeudi 29 juin 2023

Un congé réflexif

Je me donne congé, en plein milieu du jour,
pour tirer de l'ennui l'essence d'une langue
que je veux honorer sans l'ombre d'une harangue,
alors qu'à peu de mètres le pain cuit dans un four.

J'ouvre le dictionnaire, à droite du bureau.
Un volume au hasard, et regarde une page,
la cocotte en papier d'un enfant pas trop sage.
Mais quelle déception pour un godelureau !

J'ignore bien des mots qui charment mon oreille
et caressent mes yeux de gribouillis exquis.
Si la langue est amante, elle est la Sans Pareille,

que l'on cherche toujours mais jamais ne se donne,
autorisant, au plus, que l'on trace un croquis
des sons qu'elle sait aimer, de l'hiver à l'automne.


Llavors, labor d'hort

Llavors grosses i lleugeres en la teva mà,
llavors de carabassa o de carabassó. Vida
en suspensió, que espera l'aigua del pou

i la teva suor. Terra fina i lleugera, gairebé
blanquinosa de tan desús al llarg dels dies.
Casa petita, abandonada, sense cambra

de bany, ni llum, ni biblioteca. Somni lent
d'una instal·lació i d'una collita generosa
en mig de llibres convidats. O escrits.

mercredi 28 juin 2023

Le regard d'un peintre

À Michaël

Clair et las dans le soir qui se fait.
Douceur de la parole qui l'accompagne.
C'est un regard qui a bu le monde

et n'en tire nulle gloire. Derrière lui,
des toiles, de couleur ou de gris, amples
épopées d'un individu ou fresques vives.

D'un bleu changeant naît un gros éléphant
qui se gausse au salon du rire des enfants.
Dans un plat, deux ou trois courbes mordorées

d'un poulet mariné que nous partagerons,
avec la semoule fine et les grains de piment.
Pigment d'une essence que le peintre nous offre.

mardi 27 juin 2023

Facéties au Vernet

À la communauté d'Arrels-Vernet

J'ai aimé oublier de l'été la chaleur,
le besoin lancinant d'eau fraîche et pétillante,
le repli silencieux dans la musique lente
et les pales sonores de mon ventilateur.

J'ai aimé retrouver, dans ma vieille valise,
ma tenue d'histrion avec son gros nez rouge
et son chapeau fleuri qui rit quand on le bouge
devant tous ces enfants qui attendaient qu'on lise.

Mais le sort facétieux, espiègle et déroutant,
m'a soudain fait chercher, dans les plis du filet,
les quelques coquillages, que j'y avais laissés.

On y entendait la mer et les reliefs du temps
que les enfants trouvaient en refermant les yeux,
riant aux facéties qui les rendaient heureux.

Et le compte s'enfuit

J'ai voulu compter.
Compter les syllabes.
Sur chacun de mes doigts.

Cinq et cinq. Et puis six.
Une main ne suffit
que déjà tu saisis 

Baisers digitaux,
syllabes jolies
et le compte s'enfuit. 

Dernières heures

Dernières heures,
silence de coton.
Respiration en paix. 

J'attends les oiseaux,
le frôlement des feuilles.
Je les entends déjà.

Tu ne m'entends pas,
mais ton corps, déjà,
me sait là.

lundi 26 juin 2023

Un palimpsest de ferro rovellat

Estrany palimpsest de ferro rovellat,
el vell mercat ha perdut les entranyes,
el crit agut de les peixateres grasses,
i els trasbals capbaixos dels antics parroquians.

Sense carn ni desitjos, se li veu, entre els ossos,
les façanes alteroses dels immobles renovats.
Passen cotxes i motos sense aturar-s'hi,
el barri s'està buidant de la vida menestral.

Ja no sento guitarres ni sons de rumba catalana.
Una senyora grassa, que no sembla peixatera,
em demana, impacient «Do you speak english?»
Li parlo d'ossada fèrria i me'n vaig tot rient.



Com un respirador

Com un respirador,
enmig del campanar,
la finestra emmudeix,
ocultant sos secrets.

El fullatge s'entreobre
quan s'atura l'amada,
per parlar-me de sobte
de quan s'hi amagava.

La finestra és tancada
per ferro rovellats.
Mes quan acluco els ulls,
la sento respirar.



Étrange soupirail (sonnet déstructuré)

Étrange soupirail qui regarde d'en haut,
volant à ma présence le souffle de l'attente.
La porte refermée, comme une obscure fente,
m'invite à disserter sur ce qui fait défaut.

Les années oubliées par la pluie qui dévale,
le rire du quartier, la rumba des Gitans,
les chewing-gums à deux sous, l'espoir des habitants,

et, par-dessus tout ça, l'enfance de l'aimée,
les contes dessinés auprès des vieilles tantes,
les boîtes à couture, leur incroyable entente,
tout ce qui préparait à bientôt essaimer.

Car quand je lis tes pages et voyage en tout lieu,
je reconnais ton monde et j'y cherche tes yeux,
sans qui je ne sais rire, ni entrer dans le bal.



jeudi 22 juin 2023

La langue

La langue est pâteuse de café, je la laisse s'exprimer,
au hasard, en français, l'une des langues du cru,
avec le coréen sourd et le japonais sautillant.

Derrière moi, la faïence tintinnabule, joyeuse, acide,
espiègle, comme pour mieux appeler la vapeur rauque
du percolateur, son promis. Je l'entends, présomptueux,

précoce. Les tasses, insatisfaites, se tournent vers d'autres
bruits, cristallins, eux : ceux des petites cuillères nickelées
qui m'appellent. Mais je ne prends pas de sucre...

Une fiction

J'ai laissé la fiction s'installer entre la ville et moi.
De lentes circonvallations entre Commerce et Grenelle.
La fréquentation de cafés et d'une petite bibliothèque.

Être un autre sans ne jamais cesser d'être moi-même.
Nulle forfanterie. Le désir tout simple de me fondre
dans le paysage, de l'épouser, pour écouter à chaque

instant son bruissement, dans le transit des passants
affairés et des bicyclettes électriques. Une fiction de
trois jours, comme un ricochet vers ta terre.



Porte close

La porte est close
et l'ombre se tait.
Tiède rocaille

des parois épaisses.
On y fusilla l'œillet,
on y attend le jour.

Nul jamais ne passe
dans cette large rue
qui se nomme Santé.



Si belle

Si belle, dans sa fragilité,
elle convoque, à son chevet
les feuilles qui la couronnent.

Apothéose fugace d'un tégument
qui déjà se fendille de mille ridules,
et de plis insensés.

Se voit-elle déjà, desséchée, reposant
entre les pages d'un herbier oublié ?
Ou marquant la page que tu lis ?



Inservible, somrient

Inservible, la nansa somriu.
Pegada al ventre de la terrissa,
fuig de les mirades fugisseres.

Espera la nit i el frec tan tebi
de la lluna de juny. Tancarà,
els ulls i es deixarà acariciar.

Lentament, sensualment. Gelós,
com un gat de peluix el ventre
gras de la terrissa s'esgarrifarà.





Blues germanopratin

La réclame s'affale comme les voiles d'un galion
abandonné. Sur le goudron chaud et collant,
le plectre citronné brode des sons. Trois copains

font oublier le jour qu'il est. Le solstice, la fête
de la musique, en d'autres lieux compassée est
ici le sourire d'un non-anniversaire. Chacun

joue avec la trajectoire d'une vie, la sienne, la leur.
Une voiture s'arrête, de l'autre côté du boulevard.
On en tire des sacs de skaï fatigué qui ne serviront

pas. Peu à peu, le public déserte le coin de rue.
Le Vietnamien et mon fils m'attendent. Je pars.
En moi, la musique s'installe.




Des fleurs de cerisier

Chez Vigouroux

Des fleurs de cerisier au cœur du velours sombre,
un nom qui fleure bon l'Aubrac et la pluie qui ne cesse.
Vitres épaisses, comme d'un aquarium mobile.

Les conversations alternent lentement, dans le respect
de chacun. Beauté de la voix qui aiguille le touriste
égaré avant d'en prendre congé. Le percolateur de zinc

susurre des rendez-vous soudains. On y vient par hasard.
On y reste par choix, comme si l'existence y prenait
une couleur nouvelle. De fleurs de cerisier.

mardi 20 juin 2023

Un complet bleu

Il parle seul, la main gauche dans son complet bleu.
Il parle seul et arpente la chaussée grise. Beaux yeux bleus.
Le nez, épaté, s'est crevassé de tant d'apéritifs bus sur le zinc.

Nul ne lui parle ni ne l'interrompt. Ses pieds sont petits, clos
dans des souliers vernis au cuir qui se craquelle. Derrière
la large vitrine d'où je l'observe, je peine à imaginer la teneur

de ses propos. Une vie peut-elle tenir en cinq minutes de regards
assourdis ? Un bus passe, il s'y engouffre. Tout près, l'église de
la Trinité, enturbannée, le regarde disparaître. En silence.

lundi 19 juin 2023

Mogudes

El terra es mou i no s'atura mai.
Terra sense terra, de vellut fosc.
Tantes petjades aturades i que frisen

per anar-se'n.  No parla ningú, fingeixen
dormir. El temps és una llosa gèlida
i fa tanta calor a dintre. Qui mourà

un dit, una mà o una cama? Ningú.
Al meu darrere, plora un nadó amb veu
sofocada. Ningú es mou. Ni l'escolta.

Sabates, chaussures

Sabates, chaussures, que no tenen nom ni llengua,
vous reposez défaites sur la moquette grise.
D'où venez-vous i cap a on aneu? No ho sé

Peu m'importe. El tren avança, encegat, a tres-cents
kilomètres heures et vous ne bougez pas. Sota
les vostres soles, la poussière des banlieues,

dintre del vostre cau, l'énigme d'une vie arrêtée,
per una estona, o més. Chaussures, sabates
d'esport o de xarol. No importa. Peu m'importe.

dimanche 18 juin 2023

Aigua d'Agullana

Aigua d'Agullana, del diumenge auguri degut.
Maragda de fulles vives i de troncs torts
que s'emmirallen al fons de la piscina.

Gespa rasa, coixí inflable i testos silenciosos.
La geometria asimètrica anuncia ja la immensa
corona de cartró daurat portada per tots els amics

de la Lídia que fa anys avui. Vuit. Xifra rodona
i infinita. Infinit de l'amor que li tenen els pares,
l'àvia, els familiars i tota la canalla transfronterera.



Une lecture en son début

La glace est lisse sous la main.
Lisse et fraîche. Est-elle table
basse qui se tachera de cercles

d'alcool, à l'heure des apéritifs,
ou bien paroi vertigineuse, rivetée,
d'un gratte-ciel de bureaux vides ?

La glace est lisse sous la main...
Métaphore habile d'une lecture
en son début, quand on ne sait

ni où l'on va ni d'où il vient,
ce livre à venir, aux mille pages 
rugueuses et acides. Délicieusement.

Borinotada

- Burret, burret, ets un borinot.
- Burreta, burreta, ets una borinota.
- Però si no existeix cap de les dues.

Justament, per això t'ho dic. Per molts
borinots que hi hagi al jardí de casa, mai
no diràs cap borinotada. Ets sàvia, llesta,

i m'encanta prendre't el pèl. Fem les paus,
oi? I entrem de bracet al diccionari. Seràs
burrinota i jo el teu burrinot, Què et sembla? 

Seguir-te per caminois

A la memòria de la Montserrat Roig

M'agrada seguir-te, pels caminois
de la literatura. Libres olorosos,
per estrenar. O troballes casuals

pels passadissos de la memòria.
Entre nosaltres, s'esfuma la frontera.
Les fronteres. I ens inventem espais

compartits al llarg de la vida. Íntima
geografia que no deixa de viure, més
enllà de la mort de les novel·listes.

Un bri de rostoll

Un bri de rostoll. Sec, pàl·lid,
entre les pàgines obertes al dia.
Anys de foscor i sequera,

sota la caseta, a recer dels homes
i dels pactes infames. Barcelona,
el lleu plugim no t'aixopluga ja.

El bri de rostoll, dur, inflexible,
és una fletxa que marca a l'amada
la direcció cap a la ciutat alta.

L'estimada, sota arbres i porxos,
porta, de la Montserrat Roig, sota 
el braç, les pàgines groguenques.

La mare l'espera, a la residència.
Entre ella, la filla i el llibre,
el bri, senyal miraculós i lliure.

vendredi 16 juin 2023

F.R.E.C

Sàvia associació de membres,
sense reglament ni divisa.
Van de dos en dos, lliures.

Els uneixen frecs. Senzills.
Determinants. De pell, nassos
i capcirons. Mai res de mústic.

Paraules mussitades, al capvespre.
L'hora violeta és seva i ja es tanquen
els vells diccionaris acadèmics.

Estenent

T'imagino al jardí,
entre casa i caseta,
estenent la roba.

Et somric, no em veus,
m'imagines estenent,
entre casa i paret.

Ens acompanyen llibres,
ja llegits o per llegir,
entre casa i casada.

Rentadorada

Ningú et mira mai, 
tret dels infants.
Rentadora, t'adoro.

No t'acaronen mai
sinó que t'arraconen.
Rentadora, t'adoro.

Només et parlen
quan t'avaries.
Rentadora, t'adoro.

Fas molt millor que
mil voltes del món.
Rentadora, t'adoro.

mercredi 14 juin 2023

Pluja, pluja i més pluja

Pluja, pluja i més pluja.
Caragolina, ja treus les banyes?
Jo, ja em trec les botes verdes

de l'armari fosc i me les poso.
Passes de gegant com pel passadís
de l'escola estimada...

Mes, avui, no hi ha Mixi ni Mixu.
El pallasso s'ha empassat el nas.
I el poeta escriu entre gotes.

mardi 13 juin 2023

Un retour

Les pages se tournent lentement,
pages grises à l'encre entêtante.
L'homme mastique tout en passant

les nouvelles. Il se penche soudain.
Une miette est tombée de sa bouche
qu'il essuie brusquement. Une tache

de gras assombrit encore le cliché
du tremblement de terre et des femmes
éplorées. Il est dix heures quarante-huit.

Mingle

Un petit instrument
que no fa més d'un pam

i que apareix i desapareix
en un tres i no res.

Para l'orella i escolta...
Sonarà, estrany, confús.

Confús i coherent,
una barreja curiosa

de sons i sorolls de vida,
una vida inventada,

sense ombra ni flaire,
simfonia de l'impossible.

Wabi-sabi 侘寂

La mà descansa en la taula de melamina
blanc trencat. Un xic inflada, amb cicatrius
petites, nombroses, d'èpoques distintes,

com l'historial d'una vida única, irrepetible.
Fa dies que el vermell de les ungles curtes
s'ha descantellat, com melamina usada.

La dona parla amb les mans. Paraula lenta,
difícil. No sap ben bé de què parlem. Bellesa
sumptuosa de la imperfecció. Wabi-sabi.







lundi 12 juin 2023

Pomme, pomme. Que d'eau, que d'eau...

Pomme d'amour ou pomme de discorde ?
Le rouge que l'on croque ou le couple qui craque ?
Qui t'a lancée vers moi, petite sphère du mal ?

Pierre qui roule n'amasse pas mousse
et pomme qui pousse deviendra-t-elle rousse ?
Petite poule rousse des contes enfantins,

rends-moi ce fruit, sur l'étal oublié,
pommeau de la porte où je sais qu'on m'attend,
ou pommeau de l'épée que déjà tient ton gant?

(Atelier poétique de la médiathèque d'Elne)

Hasardeuse cueillette

Caminante, no hay camino,
se hace camino al andar.
Antonio Machado

Je suis sorti hier soir, en quête de brindilles,
des idées de vers neufs, au creux des caniveaux.
La pluie s'est invitée, dont je suis peu dévot,
me poussant à rentrer, sur une peccadille.

Hasardeuse cueillette qui délaisse l'objet
pour le cheminement, sans qui la langue meurt,
perdue dans un cerveau qui ignore le cœur,
quand fleurissent les vers, tout au long du trajet.

Des gouttes dans le cou, un goût d'apéritif,
la maison est si sombre où finissent les pas
et s'assemblent les mots quand survient le repas.

Bien fou est le poète qui veut du positif
et peste en revenant, son panier tout percé,
alors qu'en cheminant, il en cueillait assez.

Com si m'escalfés

Com si m'escalfés, de sobte,
de cara al taller de la tarda,
m'assec a la taula vermella

i escric. Versos curts, ajustats,
records immediats de l'existència
que neix i es desenvolupa.

Nostàlgia del cafetó que, ben prest,
m'escalfarà el cor i tenyirà de fosc
la meva tinta rossellonesa.

Qui és aquest gall ?

Qui és aquest gall
que canta a l'entrada
del poble adormit ?

Un gelós presumptuós, sol,
quan ja frisen els pinsans
i feinegen els poetes ?

No importa. N'he fet, de cop,
la signatura sonora, única,
d'un matí de mitjans de juny.

Sorollet

Sorollet de les nostres converses,
encara present quan tot just clareja.

M'assec al sofà de cuir fosc i deixo
entrar la seva flaire remorosa...

Minuts de calma profunda i fruïció.
Quan m'aixequi, m'esperarà el cafè

compartit fa poc. Sorollet rapidíssim
i saborós d'una setmana roseritzada.

vendredi 9 juin 2023

l'atelier du lundi

Un lundi au soleil, et nous autres à l'ombre.
Elne digère encore, qui nous ouvre ses portes
et sent pousser en nous l'esprit d'une cohorte.
Ne nous emballons pas, étant en petit nombre.

La salle est silencieuse, on nous écoute ailleurs.
Libérons la parole, hors de toute métrique.
Qui s'y soumet un jour, encourt des coups de trique,
alors qu'il suffisait d'interroger ses pleurs.

L'émotion est première, puis l'image en second,
les sons font une tierce qui bouillonne tout bas.
N'écrivons pas beaucoup pour emplir nos cabas

de galets colorés, comme un vieil Harpagon.
Des mois s'écouleront, avant qu'on se revoie.
Le soleil, je le sais, nous prêtera sa voix.

Le long de la frontière

Pourquoi écris-je si tôt ? 
Peut-être, tout simplement,
pour te lire en retour 

et sourire longtemps.
Mes vers sont un relais,
le témoin d'un  temps bref,

qui tourbillonne espiègle,
le long de la frontière,
et jamais ne me laisse.

Dans tes mains

Dans tes mains, un peu de sable blanc,
de l'ancienne carrière ou bien de cette plage
où nous marchions naguère quand le soleil dormait.

Souvent j'y pense, quand je la couvre de baisers,
avant de m'endormir et de céder ma plume.
Les mètres sont un piège ou un carcan très doux,

alors je les néglige et songe à cette poussière
qui n'a rien du brillant de celle des étoiles
mais signe de notre cœur la présence éternelle.

mercredi 7 juin 2023

Queviures

Cosetes essencials
que sorgeixen de l'ombra,
unes capses glacials,
un sabó, una escombra.

Si la birra et sap greu
demana una carxofa
tot el que hi ha és teu
fins a una pellofa.

El mot es ben curiós
que surt de l'ordinari,
mes si ets ben curós
en seràs milionari.

Un parc abandonné

Un parc abandonné, une antique demeure,
sans visiteurs ou presque pendant les heures chaudes.
Entre les feuilles vives naissent des émeraudes
que seuls voient les amants qui y goûtent les heures.

Le temps s'est suspendu qui regarde vers l'ouest.
Un banc en son milieu sert de cadran solaire.
Le soleil est si haut, l'atmosphère si claire
qu'on croit à un miracle, une offrande céleste.

Le parc s'effacera, les amants s'en iront.
Mais ils en garderont, au cœur de leurs pensées,
la nostalgie secrète de qui se sut aimé

et marche, en souriant, au milieu des cités
Que fut cette demeure, ce soudain abandon ?
Qu'importe désormais. Pour eux, il fut créé.

mardi 6 juin 2023

Núvols i germanor

Núvols majestuosos, gelosos,
respectuosos, que deixen el cel
lliure, blau pur, perquè s'hi creuin,

uneixin, aixequin braços germans.
Majestuosa construcció que dissol
el contrast de colors, com si tot

es resolgués en les colors primàries
del cel i dels núvols de les muntanyes
del Conflent, un diumenge de juny.





















© Marie Lopez

Futur proche

Puis viendra la Norvège,
quand tu en auras assez. 
Cette morsure beige
dans l'océan glacé.

Ton train découpera
chaque fjord à ton front.
Bientôt tu oublieras
la douceur des vallons.

Couper cette coquille,
au tranchant du rasoir,
et jeter tes béquilles
dans un vieux pourrissoir.

Tel sera ton programme
que j'entrevois en rêve :
l'évasion d'une femme
quand le soleil se lève. 

lundi 5 juin 2023

Amor en 4x4

Amor senzill,
senzill i ver.
Indispensable. 
Les veus es casen.

Qué baixos els gegants!

Què baixos els gegants, 
adormits vora el casal!
Homes i dones del sud

s'enfilen amb l'ajuda
benèvola del nord.
Confiats, els gegants

accepten la desfeta.
Quan s'acabi l'actuació,
tornaran a regnar.






















© Marie Lopez

Músics

Músics. Estiuencs. Compassats.
Concentrats rere ulleres fosques.
La bellesa del poble es va esfumant

amb el ritme de l'acompanyament.
Marquen el temps amb més minúcia
que les busques d'un rellotge

o el so greu dels quarts del campanar
vell. Van fixant els límits de l'actuació
i li donen color i relleu. Imprescindibles.


 













© Marie Lopez

Mans

Mans agafades, creuades, pensatives,
autònomes i solidàries, mans de vida
privada i pública.

Mans valuoses, mans precioses, úniques,
respectables i respectades. Força púdica
d'un cos social que s'enfila.

Aviat, tornaran a la vida privada, sagrada,
mes, en adormir-se recordaran la dolçor
de l'acció comuna. I de la seva generositat.













© Marie Lopez

Canalla

Entre cel i terra, la canalla
es mou, concentrada, sense por.

Diuen que és el nostre avenir,
necessari, i que ja han començat

la trajectòria llarga que els durà
a apropar-se cada vegada més

al terra rugós del nostre país,
a deixar el sol per al sòl.

Obertura de la vocal. Molt més
que un joc de sons. Una revelació.






















@ Marie Lopez

Llavors

Als Pallagos del Conflent, amb motiu
del seu desè aniversari

Retallen el cel tan blau del Conflent
amb peces fines de teixit roig fosc.
Al peu, s'apleguen amics castellers.

Germanor profunda i espontània.
Del sud i del nord, sense cap frontera,
units per la llengua, tots fan pinya. 

Llavors antigues i renovades. Anys
i panys d'assajos i actuacions. 
Per molts anys, Pallagos!





















© Marie Lopez

Paral⋅lelisme

Paral⋅lelisme. Imperfecte.
Meravellosament imperfecte
Mirall verd de les senyeres

del Casal del Conflent. 
Així sem quan actuem.
Iguals i lleugerament distints. 

Cadascú té el seu lloc
entre nosaltres. Sem colla
i molt més. Vine i gaudiràs!


 



















© Marie Lopez

dimanche 4 juin 2023

Germanor

Construcció fràgil i delicada.
Es barregen colors del Conflent
i del verd Riberal. Amb entusiasme

i serietat. Concentració màxima.
Un dia abans dels deu anys dels
Pallagos, la germanor s'expressa.

El blau del cel de l'estany assisteix,
silenciós, com un testimoni d'amistat
i ajuda. Catalunya Nord us necessita!






















© Marie Lopez

A punt

A punt de trontollar, el pilar es manté
ferm. Força interna, cega i entusiasta.
L'Alain es fa ballarí i la busca verda

i blanca marca les dotze del sàbat,
al zenit del cel de Sant Esteve amb
unes taques de blau bressolenc.

Qui recordarà l'ensurt fugaç i
la recuperació sobtada? La Marie,
callada, ho grava tot. Per sempre.





















© Marie Lopez

samedi 3 juin 2023

Jugant amb vocals i consonant

Xarada, xerrada, xerada.
Del joc de mots al fogueró,
passant per la conversa,

aquesta parella gaudeix
d'un fotimer de dons
en ritme i equilibrisme.

Mestres de l'enginy, tenen
un geni particular i únic...
... que es diu Genís.

(1er premi de la Bressolada:
un gelat i un poema personalitzat,
els dos per compartir)



















© Marie Lopez

Estampa piadosa

A dalt del calvari, el Crist en creu.
Al peu, la seva imatge benèvola,
orquestrant la sagrada passió

El flanquegen dos lladres,
Bernabàs el pirata i el Yannick
que ja pensa en com sortir-se'n.

A una banda de la crucifixió,
la verge Françoise està resant.
Amb ganetes de salsa cubana.















© Marie Lopez

El pilar calçot

Al Mickael i el Samuel mestres en calembours

El miracle és a les acaballes
i ja surten, entre bastidors,
els bons actors.

Amb cap de salsa romesco i roba
de terra ben calçada, s'assemblen
al nec plus ultra del moll casteller.

Aquest és el secret del pilar de sota:
concloure l'actuació per unes postres
que tenen un regust d'entrant aperitiu.






















© Marie Lopez


Un assaig

Al Martí

Un assaig. Qualsevol. Mes un assaig
excepcional. Com tots. Com cadascun.
Es barregen camises verdes de l'entitat

i roba de paisà. Braços aixecats. Cossos
ferms. El cor de Sant Esteve batega, lent.
A dalt, els castanyers somriuen, tendres.



Entre fille et père

À Marie et Henri

Entre fille et père, un collier,
un collier tout en or, confié
au détour d'un castell.

Les maillons sont épais, comme
des chaînes de forçat, mais ils sont
liberté, passant d'un cou

à l'autre, dans un sourire uni.
La nuit bientôt viendra, dans un noir
sidéral. Entre eux, l'or brillera.

Inversion

Et si nous inversions la coutume ancestrale
qui tire du papier le sang de l'encre vive,
l'élégant Garamond qui toujours nous enivre 
en barbouillant de noir la blancheur des vestales.

Du noir de l'univers, un jour de pleine lune,
la lumière naîtra au détour d'un nuage
des plus ébouriffés, onctueux comme un cirage,
en en faisant jaillir le feu de son enclume.

Qu'importeront les mots, la main peut bien attendre
de lire dans les astres l'inspiration soudaine
qui confie au poète un écheveau de laine

et l'invite à écrire quand gèle à pierre fendre
son cœur de troubadour recherchant dans la nuit
la poussière d'étoiles qui taira son ennui.





















© Marion Guarinos

vendredi 2 juin 2023

Fangars

Quina és aquesta febre freda
que et persegueix de sobte?
L'ombra fugissera d'un moix

o la impossibilitat d'acabar
la teva lectura a temps. Com
si tinguessis presses i reptes,

vago, inútil. Deixa't de febres
vanes i de moixos imaginaris
i vés-te'n a pastar fangars.

Un doigt dans le lait

Trempe ton doigt dans le lait tiède,
la terre cuite, vierge, le boira.

Palimpseste impatient, elle aura
tôt fait d'oublier tes écrits, ce geste
premier du poète,

tremblant devant la couleur de l'aube,
ou le chant imperceptible d'un coucou.

Ametista de fulls

Tractaré la novel·la com una ametista,
l'esquarteraré d'un cop i en treuré aguts
fragments de quars violaci.

Versos compassats dormisquejant a l'ombra
dels rengles negres i muts: alexandrins
ballarins i decasíl·labs valerians.

No m'importen els discursos polèmics
ni l'aspra voluntat d'épater le bourgeois
sinó la dolçor xafogosa d'una nit.

jeudi 1 juin 2023

Laisser entre les mains

Laisser entre les mains courir la blanche espèce
que chantait Valéry du haut du cimetière,
car le sable égrené est un peu de la terre
où chacun des vivants croit laisser une pièce.

Si l'obole est fort humble, son métal fut frappé
par un vieux forgeron, qui aimait son métier,
mais pestait tout le temps,comme un vrai charretier
avant de disparaître, par le temps rattrapé.

Alors quand vous aurez entre vos doigts agiles
un peu de poudre blanche, de sable ou bien d'argile,
songez au forgeron, sans qui vous ne seriez,

parmi la multitude, qu'un pion désorienté,
croyant que l'échiquier a le confort d'une île,
oublieux de ses frères à qui il est lié.

En clau transfronterera

Som deixat entrar la veu dels callats
al peu de les imatges, en bocinets
petits, sense m'hi aturar.

Qui no capta l'alè, la confidència rara,
la sobtada imaginació d'una vida de llar,
no entendrà mai lo que som volgut fer.

Un homenatge blanc, en clau transfronterera,
per celebrar avui unes llaunes boniques que
ben aviat seran la sal de les converses.

En vers du roman

Je chercherai demain, entre les lignes noires,
deux ou trois vers jolis pour t'en faire un bouquet,
bien loin de la naissance des sentiments coquets
que le lecteur recherche quand arrive le soir.

On te sait romancière et moi j'écris des vers
que la nuit je surfile quand je te vois dormir,
plongeant dans ces histoires où souvent je me mire
en être singulier qui danse nu l'hiver.

Les vers sont fantaisie et le roman austère,
mais, bien souvent, ma foi, je goûte le contraire,
sonnant à cloche-pied, le glas de mes confrères,

qui aimeraient parfois surfiler de la prose.
En bel indifférent, je vois la vie en rose
une romancière m'offre l'apothéose.