lundi 28 janvier 2019

As museu / Au musée

Fosquet, un diumenge de silenci,
es museu t'acollirà greument
i sense que li donguis res.

Entre guàrdies muts i secs, es
marbre viurà, tranquil o obscè, 
entre sala i sala. De ses èpoques

llunyanes, colliràs el gest sense
data. Un rostre, una mà, s'avidesa
des soldat i s'abandò de l'al·lota.

No diràs res ni t'aturaràs. Tancaran
ses portes, sense veure't. Sa mirada
fixa en ses rajoles, t'hauràs volat.

***

Un dimanche soir silencieux,
le musée t'accueillera gravement
et sans que tu ne lui donnes rien.

Parmi des gardiens muets et secs, le
marbre vivra, tranquille ou obscène,
entre deux salles. Des époques

lointaines, tu cueilleras le geste sans
date. Un visage, une main, l'avidité
du soldat et l'abandon de la jeune fille.

Tu ne diras rien ni t'arrêteras. Il fermeront
les portes, sans te voir. Le regard
fixe sur les tomettes, tu te seras envolé.

Laisse la rive

Délaisse le port vieux
et longe la rive étroite
qu'envahit l'herbe grasse.

Au bout d'une demi-lieue,
tu verras le canal avalé par
la bouche d'un diable rieur.

La roche terne suera les eaux
que ton corps mutique ne sut
pas exhaler et qu'il retint

en vain, oublieux des courses
haletantes. Alors, serein, disert,
tu pourras faire halte et écrire.

Lune de glace

Dans mon cœur gelé,
la rondeur sommeille et luit. 
La lune est de glace.

dimanche 27 janvier 2019

Candelària / Chandeleur

Una setmana al davant,
set dies rodons d'espera,
tan rodons com les creps

esperades. Clares, tèbies,
tendres, despullades o amb
lluentons de sucre o fosca

melmelada de maduixes. Les creps
no es mengen amb avidesa, s'esperen
un any sencer i, a casa de la mare,

es comparteixen en torn d'una ampolla
de sidra barata, sense deixar mai de
xerrar de les immillorables creps del

passat.

***

Une semaine devant nous,

sept jours ronds d'attente,
aussi ronds que les crêpes

attendues. Claires, tièdes,

tendres, nues ou avec des
paillettes de sucre ou de la sombre

confiture de fraise. Les crêpes

ne se mangent pas avec avidité, on les attend
toute une année et, chez sa mère;

on les partage autour d'une bouteille

de cidre bon marché, sans jamais cesser
de parler des indépassables crêpes du

passé.

No pateixis / N'aie crainte

No pateixis, deixa córrer
sa «cuesta de enero», freda,
inhòspita. Deixa entrar dins

es teu cor l'absència, sa sàvia
absència de sa llengua estimada
com sa pilota callada devora

sa pista mos parla d'un partit
guanyat en mig de crits i música
i mos alegra, tot rodó, es cor.

***

N'aie crainte, laisse filer
janvier le misérable, froid,
inhospitalier. Laisse entrer dans

ton cœur, l'absence, la sage
absence de la langue aimée
comme le ballon silencieux au bord

du terrain nous parle d'un match
gagné au milieu des cris, de la musique
et nous enchante, tout rond, le cœur.

Coco

De Chanel j'ignore la faconde
et le surnom mais, du bois,
je tiens l'essence au creux 

de la main. Crème blanche qui,
lisse, la comble, close du sceau
sombre de l'île adorée. Là-bas,

on la déguste dans des restaurants
d'or, chamarrés de voix et tintements,
ici, elle ferme les chinoiseries

d'un trait de douceur avant la nuit
glacée. Disparue, la coque de bois
sur le trottoir abandonnée, ensachée,

elle laisse, interminable, le goût
doux et prégnant des bonheurs de naguère et 
le sourire silencieux d'un géant de papier


Galène

Les mines du Roi Salomon,
au creux de la main. Lourde,
froide, chaude, tiède, brûlante,

galène de mon enfance, mi pierre,
mi métal, invisible maîtresse des
ondes qui grésillaient au rythme

du bouton qu'avide je tournais.
Courses de chevaux de parrain,
nouvelles internationales de pépé,

mes premiers mots dans une langue
étrangère qui n'était pas la leur,
première, comme bien plus tard,

je l'apprendrai. Galène galactique
que, pieusement, mon enfant rangera,
plus tard, pas trop tard, au hasard

des rencontres, le cœur dans les étoiles,
la voix fredonnant, inconsciente, sur
des rythmes autres mais un pareil désir.

samedi 19 janvier 2019

Le silence de l'ami

La façade est d'or et le ressac gravillonne. Il n'est pas de marée
au village des délices.

Un peintre y reposait ses fredaines passées. Un homme et une femme de l'origine du monde font la tendre

expérience, Volets clos, les langues chatoient. Mon ami est silence.
À mes oreilles. Seulement.

jeudi 17 janvier 2019

La forme est couleur

Sur la peinture de Thierry Vicente

- Qui hais-tu ?
- je ne hais pas
et même je ne suis

presque pas. La forme
est couleur dans les bras
de l'enfant, sur le banc,

et les ombres dessinent
mon enfance qui n'est plus.
- Alors, qui es-tu ?

- Je ne sais. Regarde mes toiles
tendues, derrière est l'entrelacs
des fils de fer qui m'inspire.

La vie. Eva. E la nave va...

mardi 1 janvier 2019

Bon any nou / Bonne année

Tres paraules petites,
l'alè de sa vida. Curtetes,
rodones, plenes d'amistat.

Les solc escriure amb pau i
les dibuix amb es meu somriure
de cel blau, illenc i de ressol

etern. Any rere any, passa rere
passa, l'U de gener, per mi,
és un cant sense lletra. Música

pura i gestos parsimoniosos. Records
tan bells com es caminar lent i xerraire
de sa senyora Pons cap al final des carrer.

...

Trois petits mots,
un souffle de vie. Courts,
ronds, emplis d'amitié.

J'ai l'habitude de les écrire dans la paix
et je les dessine avec mon sourire
de ciel bleu, îlien et de reflet de soleil

éternel. Année après année, pas après 
pas, le premier janvier, pour moi,
est un chant sans parole. Une musique

pure et des gestes parcimonieux. Des souvenirs
aussi beaux que la démarche lente et bavarde
de Madame Pons en route pour le bout de la rue.