samedi 30 janvier 2016

Un dialogue

Les vitres s'étaient embuées,
la pluie, au dehors, ne se voyait
presque plus. Le froid était une
illusion.

Sur l'étroit canapé, le petit avait
du mal à trouver le repos. Dans un coin,
le bras tendu par la presbytie, le père
lisait.

Les yeux enfiévrés, il se reconnaissait
dans la parabole du voyageur. Il n'aurait
pas voulu être dérangé. Et pourtant il sourit,
soulagé, 

quand son fils lui parla, d'une voix fine et aiguë.
Le bras retomba, la tablette d'ivoire s'assombrit
et le dialogue commença, hésitant au tout début,
avant de se développer 

moelleusement, comme la couette sous laquelle l'enfant
n'avait pu trouver le sommeil. De quoi parlèrent-ils,
ces deux hommes qu'un demi-siècle unissait ? De peu,
de beaucoup.

De leur mère, mieux qu'ils n'auraient su le faire en présence
de ces dernières. Pourtant, du petit, la mère se tenait non loin,
immobile profil d'albâtre bordé de claire laine bouclée, mais elle
ne pouvait entendre,

le père s'en assura. Alors la parole se libéra et, sans jamais le dire,
le père se revit enfant avec un même amour pour sa précieuse maman. 
«On n'a qu'une maman», entreprirent-ils de dire maladroitement. Et le reste
échappe à la littérature.

lundi 25 janvier 2016

Un duel de soupes

Ni poudre de mousquet,
ni fleuret moucheté.

Le duel fut de soupes,
épaisses et odorantes.

Valérie, en rivale assagie,
commença de servir.

Le velouté de Jean-Yves
fut le premier. Clair, onctueux,

il exhalait le parfum de champignons
menus flirtant avec la crème. Deux

louches plus tard, la citrouille de Valérie,
y ajoutait une pointe de douceur et la couleur

qu'au soleil ce tantôt elle avait ravie.
Je ne sus les départager et m'en fus

de par les voies dépeuplées, la panse
ragaillardie par deux belles assiettées.

samedi 23 janvier 2016

Une moitié d'orange

Impudique sur le formica froid,
ouverte à la sauvette, glacée,
et longuement contemplée,

avant que de la déguster. La nuit
recèle des trésors que le hasard
nourrit et la surface grise longtemps

pèguera de l'audace d'un convive,
encore ensommeillé et qui se fit
festin d'un fruit si peu gardé.

L'accompagnateur

Non pas d'une vie, mais d'une poignée
de secondes. De ses mots et de ses gestes,
de ses mots car de ses gestes, précis,
fermes et attentionnés.

Faire tenir un univers de tendresse
en si peu. Puis apaiser longuement,
rasséréner, faire retrouver le monde
dans la tiède moiteur des draps,

disparaître enfin, car la vie est ainsi
et le sang bat aux tempes, désormais
désépaissi. En attendant que le hasard,
qui sait, vous redonne compagnie.

mercredi 20 janvier 2016

Qu'advient-il ?

Qu'advient-il quand on tient tant à un livre
qu'on en ralentit le parcours, brouille sa vue,
désapprend à lire, ânonne et finalement se jette
éperdu jusqu'à en casser la reliure ?

Qu'advient-il quand vous manque la main de Maria 
João Pires qui seule pourrait tourner les pages
assez lentement pour qu'une existence entre
définitivement en vous ?

Qu'advient-il quand, la cinquantaine passée, depuis
longtemps, on se rend compte que la main se recroqueville
sur la poignée de livres forts et vifs que l'on osera
peut-être glisser à la chair de sa chair qui au dehors s'ébroue ?

Rien. Et c'est tant mieux, car les livres vont vite et passent
les femmes et les hommes qui les lisent. Avant que de les oublier.


Un hommage petit

à Claude Rastoul

Je rythme ma présence sur un réseau social
de phrases courtes, d'aphorismes profonds,
provenant chacun d'un même ouvrage que je 
lis ces temps-ci, à mes heures gagnées.

Volonté de suspendre la course du temps ou bien
de donner foi d'une lecture assurée comme l'on
pointe à la gendarmerie, le délit consommé, dans
l'attente d'un procès mille fois repoussé ?

Non pas. Ce livre n'est pas le mien, à une autre 
il était destiné qui ne le lira pas, faute d'avoir
vécu assez, comme nous l'espérions. Ce livre, j'en 
avais soufflé l'idée à ma mère, son amie, puis j'avais

pris d'autres trains, d'autres segments de vie que
ceux que ce roman de Mercier entre Berne et Lisbonne
induisait. Alors, à mon corps défendant et à celui de
l'amie irrémédiablement absent, je lis. Comme un hommage.

Un hommage petit.

La bien-aimée

La bien-aimée vit loin, vit haut,
par delà les express, la bien-aimée
n'est pas ma bien-aimée et sur moi
jamais son regard ne se pose.

Nous partageons le café chaud et la
table de jeu, l'écran nous est prétexte
et la parole flue. Notre enfant endormi,
les heures coulent graves que la survenue

du sommeil interrompt brusquement. Alors,
le matelas est froid et je ne veux pas tomber,
je m'accroche aux minutes, aux heures parfois,
je revois les bribes d'un bonheur entrevu

et qu'il faut ménager comme un havre joli, par
respect. Enfin. Par curiosité aussi. De voir le temps
marquer de sa noblesse des routes neuves sur le visage
de la bien-aimée avant de m'endormir d'un trait. C'est tout.

mardi 19 janvier 2016

Tain

Le reflet n'est rien si le tain ne tient pas,
l'âme s'efface et l'enveloppe tombe. Qui croit
s'y voir n'est qu'un Narcisse à la petite
semaine et le monde saisi fane sous la buée.

Psyché sur pied ou rectangle bourgeois, le miroir
ment qui dit vrai un instant car, si je m'y mire,
c'est pour m'oublier aussitôt et m'inventer la baie
rêvée, celle qui donne sur une autre baie, des anges

aimée. Le reflet est tout quand la vie vous quitte
et que l'on tend vers votre bouche assoiffée un 
rectangle petit qui jamais ne s'embue et vous laisse
tout à coup comme ce numéro abscons que jamais vous ne 

fûtes.

lundi 11 janvier 2016

Plaisante fatigue

«Soy de izquierdas, pero ya no ejerzo»,
le mot de Juan Marsé m'a souvent fait
sourire et je le gardais en poche,
pour en moduler ma faconde,

plus tard, beaucoup plus tard, pensais-je.
Le temps est venu et je me vois en enjôleur
suranné, laissant à d'autres l'exercice
périlleux de la séduction.

Bien sûr, on ne me croira pas et on raillera
le vieil acteur poudré, pommadé, empressé de
faire ses adieux pour revenir sur scène
au grand galop.

Mais le pas de côté est fait et l'observation
m'appelle qui guidera ma main sur le chemin
des ans. Je cueillerai des sourires comme on
gaule les noix. Avant de les croquer.

Heures vierges

D'un dimanche matin.
Le vent est tombé
et les draps sont 
si blancs.

Tiédeur de l'attente,
espérante langueur,
l'horizon n'est plus
qu'un point.

Du quotidien, le train
s'est arrêté, halte vive,
conscience aiguisée.
Que sont les heures,

sinon le sirop qui enrobe
les minutes, tremblant sous
la semaine entrevue ?

Silencios

Lo mejor fueron los silencios,
los roces ligeros de voz y tacto,
la mesa estrecha, los comensales
tibiamente apretados.

Y la delicadeza de las tres parejas,
tan distintas, tan semejantes. Amor,
cariño, que se desprendían suavemente
y alimentaban

las conversaciones sin que nadie se diera
cuenta o quisiera imponer un modelo. Fueron
horas de profunda amistad, de libertad total
en torno al horno

pequeño, al queso fundido. Viandas y manjares
a montones, proveídos por el amigo David que
cumplía años y acabó la noche de rey, por gracia
de la divina Noémie.

Cómodamente situado en una punta extrema de las
mesas juntas, lo saboreaba todo, amenizando el 
discurrir de las horas con bromas gastadas y
un cariño sin fin.





samedi 9 janvier 2016

Maurice et Pia

In memoriam Maurice Fanon et Pia Colombo

Pourquoi les ai-je choisis, ces deux-là,
dont la vie fut courte et passablement
écorchée ? Une chanson, puis une autre,
une interview sur un rythme lent,

Des fragments de biographie, bus d'un trait,
comme un verre de lait tiède et épais,
au sortir du pis. De mal en pis, le jeu de mots
est facile, qui me détourne un instant.

Pareillement écartés, humiliés. Triomphants aussi,
à la petite semaine. Un couple qui dure peu,
comme le vrai amour, mais la fidélité d'une vie,
Maurice écrivant pour Pia, lui montant un spectacle.

Le temps a passé, sans que ne s'arrêtent ses aiguilles,
comme me souffle une amie, le temps a passé et leur souvenir
neuf en moi s'imprègne. Chercher, dans les inflexions de
leurs voix à jamais dissociées, l'espoir d'une vie enfin acceptée.

Une dame blanche oubliée

«Le corps a été incinéré et le bureau des inhumations 
du cimetière du Père-Lachaise ne dispose pas, à ce jour 
30 octobre 2011, des informations indiquant 
ce qu'il est advenu des cendres.»

Quatre lignes mornes, à la syntaxe coupante, et Cora
Vaucaire disparaît à jamais, que mes parents aimaient.
Voix pure et grave, trop pure, trop grave, estimée
de Saint-Germain, ignorée au delà, adulée très au delà,

au Japon où le français crépite, quand il frôle l'essence.
Que seraient les feuilles mortes sans elle, que ses cendres
ont grisées. Et Rutebeuf, sur un air de Ferré, dont les amis
vivent, par sa voix, plus de huit siècles après ?

L'onde est épaisse et sombre qui passe sous le pont, l'étoile
de sang qui couronnait la tête d'un poète minervé a brisé
le miroir. Restent les sons lents et le grain de la voix
de Cora, une Nina que la France ne sut voir, écouter,

ni aimer.

vendredi 8 janvier 2016

No li faria

No li faria més preguntes, no.
Sobre la seva forma d'escriure
després d'inventar-se la trama.

En tenia prou amb el que havia 
llegit en una entrevista: quan ella
escrivia, solia sortir pels carrers.

Una novel·lista peripatètica? Com ell,
quan buscava mots, persones i imatges, 
per a les seves fantasmagories. Assegut

al sofà fosc, alternava entre distintes 
formes de llegir-la, com si volgués
assaborir-ne la factura, la fractura 

creativa, la màgia de crear un món tancat
i obert a cadascú. D'aquí a unes quantes 
hores, n'hauria acabat la lectura i ja sabia

que un segon volumen viatjava en mans dels
carters. No la coneixia, si bé començava a
compartir amb ella el gust per la poesia

clàssica. I per Valéry... I a vegades la confonia
amb la seva creatura de tinta i paper. Uf. L'Anna
Sanjuan o la Montse Grimm. Quin saborós embolic!

Écharpes

Elles voilent le cou si tendre
et s'épanchent en voiles infinis ; 
la photo serait en noir et blanc

qu'elles garderaient leurs couleurs
d'oiseau de paradis. Sages pages que
mes souvenirs passent d'un doigt mutin

afin de songer, un instant, rien qu'un,
à les effeuiller incontinent, et à courir
pieds nus sur le sable humide en les tenant

à bout de bras, comme un étendard de vie et
de désirs. Mais quand l'obscurité se fait, dans
une chambre de fortune ou une alcôve douillette,

elles me sont un dais parfumé, un palanquin sans larme,
où bercer mes nuits sans sommeil, avant de m'en aller,
funambule enchanté, me faire écharper par tes doigts jolis.

jeudi 7 janvier 2016

No la coneixia

A Montse Sanjuan

No la coneixia, si bé havia llegit
unes línies boniques al bloc d'una amiga
sobre la seva primera novel·la, de poble.

Ens vam trobar en un petit cafè,
arraconats els quatre. Les altres dues
parlaven més, i més fort. Ella, callava

rere les ulleres de vel. Em va dedicar
uns mots delicats en una plana en blanc,
afegint un número en un mocador volant.

Tornant a casa, vaig deixar passar uns dies,
unes setmanes, per entrar en el seu univers
de solitud i de sentiments, de llocs màgics

i de secrets inabastables. M'hi vaig fer un 
cau petit, una conillera, m'hi vaig trobar bé,
la mar de bé. I m'hi vaig apavaigar.

Un mundo al revés

sobre unos versos, contrapuestos, de A. Pfitzner

El tren es vida en futuro. 
Virtualidad tangible. 
Destino seguro entre 
tus manos cansadas.

El reloj es vida por escribir. 
Suaves rodeos de manecillas 
inseguras. Pasado ya desvelado.

Mañana te verá asentado de cara al presente.
Madrugador, no camines. De momento no. 
Escucha. La existencia te empuja 
hacia vidas ajenas.

mercredi 6 janvier 2016

La Boira

No hi havia anat des de feia anys,
sense voler-ho, amb mandra.
Fregava la seva porta de vidre
i la seva escala clara.

I me n'anava a Can Llovet, al centre
de la plaça, on feien cuina casolana
i barata. En parlar d'una novel·la
amiga, sota el signe de la boira

lleidatana, em vas recordar el restaurant
de Girona, la seva cuina, el nostre amor.
Han passat dies i, ara mateix, al bell mig
de la nit t'estic reinventant. La teva veu,

la teva mirada, les teves mans. La pulcritud
amb què buscaves qualsevol detall
del meu món, t'hi apropaves amb delit
i respecte. I et trobo a faltar, amiga.

mardi 5 janvier 2016

Une dent

Toute petite. Une dent de souriceau
qui est tombée tout à l'heure, la fente
est étroite et pourtant tu y passes la langue

au moins cinq mille fois par heure. Te voilà grand
désormais. Le Père Noël n'est pas bientôt passé que
la petite souris lui succède hardiment. Une pièce

argentée en poche, tel un milord, tu continueras de 
passer la langue dans la fente et, bientôt, tu sentiras
pointer l'émail d'une dent plus large. Une dent de grand !

J'ai rêvé

J'ai rêvé de ta couche étroite
et de ton corps qui tiédit puis
je me suis endormi, la tête

dans les étoiles. Magie de ces
mètres qui nous séparent et
nous unissent, à nos corps

défendants. Douceur de l'insomnie,
aussi, et de la légère fraîcheur qui
la porte. Pénombre de la pièce.

Lectures

Le train tarde à partir,
les livres sont tirés, la vie
s'anime derrière le balai
des yeux sur le papier clair.

Des succès de librairie dont l'un
m'est connu, je me transpose.
J'imagine les envolées que le texte
suscite et qui tranchent avec l'air

ambiant. Bientôt viendra l'heure de
saucissonner. Que fera le vieux monsieur
qui a cassé sa bouteille sur le quai et en
est inconsolable ? Silence. Legendum est.

Il écoute

Le regard clair est fixe, sans cil
ou presque. Dans ses mains
épatées un tube bleu électrique

bleuit : un fin baladeur de chez
Sony qui contraste avec le gros
casque blanc et jaune. Qu'écoute-t'il ?

Le voyage à Ithaque de Lluis Llach ?
J'en doute, je souris, il ramasse ses
affaires. Il est déjà parti.

Il lit

Barbe sage d'un vétéran d'Ithaque,
étranger aux cahots du train de banlieue
bondé. Devant lui un livre cassé à la

jointure : l'Odyssée, sur papier vil et
malodorant. Concentration extrême.
Son esprit s'évade qui ne cille pourtant.

Les siècles passent, Homère demeure,
avec son sillage de rêves projetés.
Et la fidélité, de dix ans notre aînée.

Empreintes

J'ai laissé mes empreintes digitales,
sur une poignée de porte, en partant,
en vous quittant.

Ridules de sable mouillé, laissées
par la mer qui reflue et demeure.
Chaleur du foyer que tu animes.

Déjà les express m'attirent au loin,
étirant le songe doux et paisible.
Ne rien te demander et tout recevoir.

Il

ll s'appelait Michel. Comme moi.
Son accent n'a jamais varié,
de rocaille et de romarin.

Il était un peu de ma chair, beaucoup
de la chair de ma chair. Il porte l'humour
de mes enfants, du plus grand au presque

plus petit. Je ne l'ai vu qu'une fois, à la gare
de Lyon. Il tournoyait dans l'espoir qu'on
le reconnaisse. Nul ne le voyait.

Je ne voyais que lui.

lundi 4 janvier 2016

Que me servent...

Que me servent les mots, choisis,
ciselés, librement disposés ou
dans un alexandrin encorsetés
si je ne parviens pas à te toucher ?

Ton rire, inouï, me réveille 
à la dérobée, mais à peine essayé-je
de le mettre en mots qu'il s'en est
allé me laissant décontenancé.

Comme ces orpailleurs qui tamisent
l'eau limoneuse dans l'espoir d'en
tirer une ou deux pépites, je crible
le gravier des sons et des lettres,

jusqu'à m'en faire saigner les doigts.
Mais rien n'y fait. Mes mots ne sonnent
pas clair quand ils sont ton miroir.
M'apprendras-tu ? J'espère.

Reconnaissance

Pour les heures que tu m'offres
dans le rayon tiède d'hiver sur
la table, dans le rythme lent
de la pendule du salon.

Heures d'attente et de travail.
Je prépare patiemment mes documents
comme tu le faisais naguère, à distance
et je pense,

avec reconnaissance à ce temps tenu loin
et qui abolit l'espace qui jamais ne fut
vaste, entre nous. Heures tacites, écho
neuf. Et précieux.

samedi 2 janvier 2016

Amor, amicitia

La corde est mince et ploie sous mon poids,
je chancelle et me redresse, raidi par l'effort.
Je croyais avoir perdu l'amour et me tournais
vers l'amitié. Confusion des genres, douce
mais amère.

Alors je me tourne vers mon vieux Gaffiot, au dos
arraché et aux pages jaunies, acheté par mes parents
voici quarante années. Trois pages serrées entre les deux.
L'amitié précède l'amour, elle va de l'individu aux peuples,
alors que l'amour est de la patrie, 

avant d'embrasser l'individu. Mais ni l'amour, ni l'amitié
des Latins mes aïeux ne me convainquent. La seconde est tue.
Où sont Virgile, Ovide, Pétrone et l'imbuvable Tertullien ?
Le premier n'est qu'une longue liste de verbes de contrats
et de tensions.

Alors, je me tais, referme le vieux livre et te regarde :
tu découpes et colles, regardant par dessus tes lunettes,
Nulle parole n'est nécessaire. Ou presque. Je te glisse :
«les plus belles photos ne se peuvent prendre.»
Et je ne cherche plus. Je vois. Je vis.