La pièce s'est tue et les livres regardent,
serrés sur les étagères immobiles qui ploient
sous le faix des années. Pas un ne cille et
pourtant je vois leurs dos miroiter quand je
passe, lentement, en proie à l'insomnie,
silencieux, retenu. Tranche jaunie, pages
cornées, reliures défraîchies ou brochure
fatiguée, ils quêtent l'œil neuf d'un badaud
égaré. Tournant les talons, je me retire
de la pièce d'habitation et je pars dans la nuit,
les yeux pleins de la supplique silencieuse de
ces pages serrées, où l'encre, soudain, a pâli.