lundi 27 juillet 2015

Le rideau cramoisi

Silence minéral. Pas une once de bois
ni une voiture ; la cuvette des immeubles
est une caisse de résonance désertée.

Le froid gagne mes épaules et je me roule
dans la couette sur l'étroit canapé. Au dessus

de mes yeux, dans la pénombre, est une végétation
touffue, sagement entrelacée. La pièce est longue

et le goût en est exquis. En un coin, un éventail de
cases blanches. Des tranches serrées. De couleur.
Artaud, en copiste, dévoie le moine que Lewis avait initié

et Spinoza, relié peau de veau, cligne de ses dorures
vers Orwell le désargenté. De Fermi la culture, de moi

inconnue, est funambule entre Hongie et Vietnam. Je me
lève et feuillette. Jamais il ne m'avait été prêté de bibliothèque
aussi dense en aussi peu de place. Au fond de la pièce, sous

la voûte des plantes, comme la toile de fond d'un théâtre chichois,
le cramoisi du rideau parachève le soir. Acta est fabula.