mercredi 6 avril 2016

À l'emporte-pièce (réflexion 1)

La radio rythme ma vie. Depuis l'enfance, j'y ai éduqué mes enfants. L'un d'eux, Vincent, m'y a dépassé, s'y exerçant avec un rare talent. La radio que j'aime est libre, publique, concise et espiègle. Futile et engoncée diront certains. C'est vrai, je le revendique.

J'ai appris ce matin que le gouvernement avait décidé d'y autoriser la publicité commerciale. «Bananière», «raie publique», «GrHollande», «bElle Khonnerie», «Belkacémiades»... et autres haddockeries, puis je me suis calmé et j'ai descendu les allées en compagnie de mon fils petit, jusqu'à une papeterie d'un autre temps, en quête d'agrafes, cet ustensile qui ne sert plus à l'ère du fichier joint.

Nous étions seuls, le papetier, Martí et moi. Mon agrafeuse, d'un modèle ancien que j'avais dérobé dans l'un de mes anciens emplois, ne correspondait à rien. Délaissant ses maigres tâches, le commerçant entreprit de la forcer à l'aide de pinces, un peu comme le faisaient les sœurs de Cendrillon, voulant à tout prix faire entrer leur pied informe dans la pantoufle de vair. Rien n'y fit. Mais pendant ce temps, nous avons bavardé, sans nous soucier de l'heure, en toute gratuité, cette gratuité qui, dorénavant, fera défaut à ma chère radio.

Ah, vous voulez savoir comment cela s'est terminé ? Une très belle femme est entrée, en quête d'un facturier. Je n'existais plus, j'ai passé la porte en poussant Martí, le cœur léger. Oui, il existe un autre Béziers...