jeudi 7 avril 2016

En vélo, vent debout.

Elle avait pris son vélo,
qui rouillait au bas de l'escalier. Le tenant à deux mains, concentrée sur le cliquetis enroué, elle avait longtemps hésité, s'en remettant au hasard. Un grain de sel, relief d'une pizza avalée d'un trait, lui avait rappelé de la mer la soudaine proximité. Elle s'y rendit, la tête dans le cou, comme pour se protéger d'un froid qui ne vint pas. Elle pédala, chantonna, mima le saxo qu'elle caressait, le soir quand le brouillard sur son balcon se posait. La mer enfin apparut, ligne de silence et de vent. Il lui fallut rentrer. Elle ne le voulait mais s'y résolut comme on joue sa vie sur un coup de dés. Le vent se leva. Un vent de terre, égratigné de sarments, rocailleux et acide. Elle n'avançait pas, sa montre tournait à l'envers et ses oreilles, n'entendaient plus de la vie et de son amour, unique, le pouls sucré. Et pourtant elle revint dans la ville incertaine. Elle ne sentait plus ses membres. Une tisane les lui rendit. Une tisane et d'un ami les vers longtemps inassouvis.