Un pont. Dans l'obscurité. Tous feux éteints.
La foule s'y masse. En silence, ou presque.
Les regards se tournent vers la lune pleine,
voilée d'une brume légère. On s'interroge sur
l'heure. Soudain un bruit sourd et une fusée
qui monte haut. C'est un samedi de la mi-juillet,
si loin de la Bastille parisienne, de ses piques
et de ses cocardes de couleurs. J'ai laissé
mon appareil mais, à côté de moi, les chevelures
rebondissent d'écran en écran. Je n'en ai cure.
Pour moi, ces quinze minutes m'offrent autant
de variations sur une chevelure unique, de poudre
noire et d'éclairs. De ces étoiles d'un centième
de seconde il me restera bien plus que dans la
mémoire des appareils froids et silencieux.
Un regard d'enfant que je n'ai jamais perdu et la joie
simple et profonde de vivre dans une république, décriée,
menacée, mais qui m'a placé, ce soir, au cœur de la nuit.