dimanche 1 novembre 2015

Fleurs coupées

Je n'aime pas les fleurs coupées. Et je les aime.
Coupées par d'autres, au petit matin, par centaines,
elles se pressent en bottes dans des chambres aveugles
réfrigérées avant que d'être proposées à l'amoureux transi
et sans imagination qui ne sait dire ses sens et tend
la tige froide d'une fleur dont le parfum tait mal le teint
évanoui.

Mais, surtout, je n'aime pas les fleurs coupées car j'y vois,
en abyme, la vie de ceux qui me sont chers et que d'autres
- un autre ? - coupent d'un geste bref et sans aucun remords.
Alors je préfère couper, moi-même, comme quand j'étais enfant
de humbles coquelicots, la pâle pâquerette ou l'étoile jaune
d'un pissenlit des rues, tendre reflet furtif de ton sourire vif.