Quand la tristesse vient, au terme du jour,
il n'est de mot qui vaille et les lettres
s'envolent en fumée. On se recroqueville
alors sur des détails anodins, insignifiants
accidents d'un quotidien chamboulé. De l'alpha
à l'omega, on néglige l'entêtante litanie pour
s'attacher aux signes imbriqués, épousés, fondus
mais jamais confondus. L'«e» dans l'«a» lié, puis
l'«e» dans l'«o». Si le cœur est à l'ouvrage, il n'en est
que meilleur à l'œuvre, et cætera. D'ailleurs, ligature
ou graphème ? Les linguistes s'égarent mais mon cœur saigne
sans fard quand, chaque année, avril est en son tiers finissant.
Alors l'envie me prend de prendre une lame d'onyx et de fendre
la ligature en deux pour exposer un coeur qui, sans toi, est nu,
ce qui rend toute discussion langagière vaine et cependant nécessaire.