Te souviens-tu, adolescent,
de ces cheminots à la vareuse
gonflée et aux boutons dorés
prêts à te sauter au visage.
Leur corps exhalait l'odeur
violente du bon café, du
café d'origine qui n'avait
rien à voir avec ce bois
moulu que la dictature
fermée sur elle-même débitait
dans de sombres tavernes. Tu
enviais leur discret marché
noir et songeais, fou que tu
étais, à enfiler leur livrée
de coutil quand au menton,
tu aurais quelques poils.
Les années ont passé. Dans
un quelconque bar, demain,
tu siroteras un ristretto
d'origine, songeant, tout
à coup, à l'origine tue,
dévoilée par un peintre français
qui du sombre triangle t'offrit
le volatil parfum du bon café.