mercredi 2 mai 2018

Une bouteille à la mer

à mon ami Ponç

Il est des marins d'eau douce,
forts en gueule et malhabiles.
Mais que penser d'un passager

clandestin d'eau douce ? D'un
enfant polisson, comme on dit
dans notre île. Orphelin, grêle,

passant ses jours, de la promesse
du soleil à sa disparition, à laver
des bouteilles dans un cul de basse

fosse et qui, un jour, s'enfuit en
rampant se mêler aux rongeurs, au
fond d'une câle fleurant bon le thé,

le rhum et les épices, de lui inconnus.
Il a pris l'une des bouteilles, l'a
séchée, bouchonnée, après avoir écrit

de son pauvre sang les mots d'un espoir
fou et l'a lancée en sortant à la lune.
Découvert, menacé d'être jeté par dessus

bord, il voit s'ériger un père qui se nomme
Dignité. Je ne vous conterai pas la suite,
le livre vous attend, comme bouteille au rivage.