à mon ami Ponç
Il est des marins d'eau douce,
forts en gueule et malhabiles.
Mais que penser d'un passager
clandestin d'eau douce ? D'un
enfant polisson, comme on dit
dans notre île. Orphelin, grêle,
passant ses jours, de la promesse
du soleil à sa disparition, à laver
des bouteilles dans un cul de basse
fosse et qui, un jour, s'enfuit en
rampant se mêler aux rongeurs, au
fond d'une câle fleurant bon le thé,
le rhum et les épices, de lui inconnus.
Il a pris l'une des bouteilles, l'a
séchée, bouchonnée, après avoir écrit
de son pauvre sang les mots d'un espoir
fou et l'a lancée en sortant à la lune.
Découvert, menacé d'être jeté par dessus
bord, il voit s'ériger un père qui se nomme
Dignité. Je ne vous conterai pas la suite,
le livre vous attend, comme bouteille au rivage.