Le train avance, lent, lancinant,
seul mon dos en perçoit le tracas.
Le paysage s'est aboli, tout comme
mes compagnons de voyage. J'ai laissé
mes lunettes sur la tablette de formica
et mon portable dans sa besace. Sous
mes yeux, Margarit vit, dans le miroir
trompeur de l'expression première en
catalan et de l'auto-traduction en espagnol.
J'annote peu, je m'imprègne de ces mots dont
il dit qu'ils sont des roses coupées par ses
ciseaux rouillés. Ces roses dont le bouquet
m'est absent, je les présenterai à mes étudiants
dans une petite heure, déjà. Sauront-ils les apprécier
comme je les ai goûtées ? Plus bas, mes jambes sont
sages, tendues de toile de Nîmes sombre. La course
est pour un temps suspendue. Bientôt je m'élancerai
dans les rues, le sac sur le dos, les roses à la bouche.