lundi 9 décembre 2019

Le goût de ta bouche

Je m'étais levé d'un bond,
la nuit, dans la pièce noire
et froide. Ma bouche, sèche

et insipide, avait perdu le goût
de la tienne. C'est alors que
mes paupières, pareilles au

rideau sombre des anciens cinémas,
se sont closes pour me laisser te
retrouver. Il pleuvait, l'eau

impérieuse qui, dans l'avenue, emportait
tout, glissait sur tes joues. Une goutte,
plus lourde que les autres, s'accrocha

à la commissure droite de tes lèvres.
Je fermai les yeux et la gobai d'un coup,
avide, comme assoiffé, au milieu du torrent.

Nous nous enlaçâmes, nous embrassâmes, le monde
pouvait bien basculer dans le bourbier. Ta bouche,
aux fraises des lèvres, mêlait la mandarine du palais.