à Anaïs
Dans les bras de son père,
la petite tient son moulin,
comme une fée sa baguette.
Le visage de son père s'écarte,
un temps, de sa joue pour souffler,
une fois, deux fois, trois fois.
Les pales de couleur commencent
à tourner. L'obscurité se fait
et son père n'oubliera jamais
deux yeux ronds de charbon,
fixes sur ses joues gonflées.
Les minutes passent, le moulin
ne cesse de tourner quand, soudain,
un vacarme de couleurs se fait
entendre, dans le dos de la petite
qui frissonne et se serre contre
la joue au souffle suspendu.
Elle est courageuse et jamais
ne pleure alors que la guerre
inconnue embrase le ciel qu'elle
zèbre longuement sur des airs
d'opéra. La petite n'en peut plus
et s'endort, secouée à chaque
nouvelle salve. Les lumières
de la ville se réveillent, la foule
commence le lent repli, le feu cesse,
et le moulin recommence à tourner.