à ma mère
Cela fait seize ans qu'elle me lit.
Tous les matins, avant le journal,
guettant la moindre publication.
Un distique, un sonnet, un billet
d'humeur. Le commentaire d'une photo
ou d'une chanson. Elle se tient droite,
lunettes chaussées, avant les mots croisés.
De ses lectures, je sais bien peu, sinon
qu'elle les aime. Je tiens d'elle mon goût
pour les langues. Son père et elle, dialoguant,
m'ont ouvert à ma langue de cœur. Les années
ont passé. À présent elle me dit acquérir du
vocabulaire en lisant mes traductions. Je souris
et l'encourage, je lui dois tant. Et surtout de
revenir à mes poèmes. Toujours et encore.