à mon père
J'écoutais parler le vent,
gravement, entre les tombes
blanches au soleil.
Midi avait sonné sur Saint
Clair et, comme chaque année,
mon père me menait devant
le marbre haut, pour une brève
prière. Ma vue, enchevêtrée aux
cyprès noueux, se perdait dans
la mer, s'attachant au sillage
des cargos disparus. Mon père
ne parlait pas, pas encore,
du moins, et nous redescendions
vers les canaux endigués où l'on
servait des calamars ficelés
et du vin frais de Pinet. Valéry
s'emparait alors de la voix de
mon père et les décasyllabes
se succédaient. Moi, je quittais
ce toit tranquille où marchaient
des colombes et, en pensée,
je gagnais Perpignan où l'on servait
du Byrrh, tiré de foudres de chêne,
où, un jour, fermenteraient mes vers.