lundi 20 avril 2015

L'estaminet

Midi le juste. L'air est pâle et le pavé
brûle l'œil qui s'y abandonne. Personne
dans les rues. L'estaminet accueille,
porte ouverte. Le patron et un client
parlent la langue de mon enfance.

Nasales, scansion. Silences. Le café
refroidit à mes côtés sur le formica
vert clair. Comme aux Glacis quand
j'étais petit. La moleskine caramel
se fendille et les ressorts couinent.

Je pense aux générations qui s'y sont
succédées, à ceux qui ont commencé
à s'y aimer et qui y revinrent plus tard
avec leurs enfants à sodas. Nulle trace
des ivrognes qui égaient le local tôt

le matin ou tard le soir. Trognes violacées,
démarche hésitante, voix pâteuse. Un petit
monde à la James Ensor dont les toiles
de carnaval ornaient les affiches du bal
du Rat Mort où parfois mes parents se rendaient.