mercredi 15 avril 2015

Le pays où l'on n'arrive jamais

Je n'étais qu'un projet de mes parents
unis quand il fut publié ce roman au titre
singulier que jamais ne cherchai.

Depuis au moins trente ans il me traque et
me supplie mais j'aurais bien trop peur,
en l'avalant d'un trait, de savoir arriver

où jamais l'on n'arrive même au cœur de l'été.
Alors j'ai négligé toutes les encyclopédies et
de Dhôtel ne sais rien sinon qu'il l'écrivit

en cinquante-cinq d'un autre siècle qui est
mon âge à présent. Et de tant l'écarter, je m'en
suis fait des dizaines de récits parallèles,

de terres tantôt glacées, et tantôt opulentes,
oasis de mots tièdes qui étaient oubliés. Pourtant
aujourd'hui, Kerouac des petits, je me verrais bien

dérouler le rouleau et y écrire de mes pas le voyage
sans fin où jamais l'on arrive mais toujours on existe.
Ou comme écrivait Machado, pas encore exténué :

«Marcheur, il n'est point de chemin,
c'est avec ses pas qu'on le trace hardiment».