Je me méfie de l'amour.
Je m'en méfie car je sais
mes défenses inutiles et
mes impulsions maladroites.
Surtout, je m'en fais un
récit, une fable, parfois
même une épopée, que j'impose
à l'aimée, avec ses fastes et
ses dorures. Serais-je capable,
par amour, d'écorcher la pulpe
de mes doigts contre le crépi
âpre d'un muret clos ? Je ne le
pense pas. Avec ses élans, mon
amour, mon pauvre amour, a des
précautions de concierge et ne
se livre pas aux extrémités qui
le menacent et l'exaltent tout
à la fois. La frontière entre
deux êtres est loin, ou elle
n'est pas pour moi. Alors, dans
l'absence de l'aimée, j'écris.