À M. Ll. F.
Le hasard m'a guidé et le livre
que je butinais naguère, voletant
au gré des pages hasardeuses, n'est plus.
À sa place, la surface lisse de la page
ordonnée. Oublié l'aléa jouissif, la marelle,
yeux bandés, à cloche-pied parmi les mots.
Non, ligne à ligne, vers à vers, être un autre,
courber la nuque, renifler, laisser le sang
engorger l'œil avide jusqu'à l'immobiliser
puis écrire au fil de l'eau comme l'enfant traverse
la rivière sur les galets chancelants, ne pas s'arrêter
jusqu'à tenir entre ses mains une forme neuve et inouïe.
Alors on peut laisser le lièvre, orphelin du serpolet humide,
s'enfermer dans une conduite intérieure jusqu'à ce que le feu,
le simple feu des mots, le libère enfin de la folie des hommes.