samedi 23 mai 2015

Festejades

À Lionel et Julie, à Marie aussi.

I - Le labyrinthe

Il y eut, au cœur même de la nuit ventée,
le lacis minéral, au bord de l'encre noire,

ces mots qui nous tenaient abrités après avoir
quitté les amies de Julie, envolées, sur un parking

de maraudes comblé. La marche était rapide, la parole
mesurée. De Gruissan j'entrevoyais les enseignes éteintes.

Les oiseaux s'en étaient allés loin. Seuls cliquetaient
les cordages. Au terme de la course, un autre parking

avala le jeune couple ami et je m'en fus, sur la route
venteuse, vers cette Catalogne où mes parents dormaient.

II- La ribambelle

Comme le photographe traquant l'angle d'un regard, le décroché
d'une corniche, je cherchais un motif et la soirée avançait

quand soudain je la vis serpenter, cette longue ribambelle
de jeunes-filles enjouées. Ribaudes d'un soir longeant les

guinguettes à musiques avant de disparaître dans la nuit. Près
de la bodega des municipaux où rissolaient des sépious, il se passa

un phénomène étrange. La ribambelle fut sur le point d'accrocher le front
disjoint de garçons, mâchoires serrées, prêts à en découdre et qui ne firent rien.


III - Le pain perdu

Nous rivalisions pour savoir qui offrirait aux autres un peu de leur repas.
Marie, la première, fut la plus prompte. Et en un tournemain, la directrice

me laissa le billet bleu à la main comme un amoureux transi sur le quai d'une gare
désertée. Je me rattrapai pour la boisson avec la complicité de municipaux avisés.

Lionel, fut le deuxième larron - Marie faisant Jésus - et nous offrit de Buster Keaton
une pantomime ventée. Il emplit notre table d'assiettes en cartons portant chacune deux

tartines de pain perdu recouvertes de sucre et de pâte à tartiner. La tramontane s'en mêla,
les assiettes volèrent et les tartines churent. En bonne tourneuse, Marie s'en fut discuter

le bout de gras avec les confiseurs voisins et parvint à leur soutirer en plus des envolées
quelques tartines supplémentaires que le pauvre Lionel fut contraint d'avaler : Gruissan, mes amours...