Je ne connais pas ton écriture,
le ballet de l'encre sur ta page,
les frôlements de ton poignet
au-dessous. Lies-tu les lettres
ou bien les distingues-tu en îles
petites, en archipels de sens ?
Je ne connais que les caractères
noirs, sans empattement, dont mon
logiciel habille tes mots. Alors,
souvent, je lis une phrase aux
allures de vers puis je ferme les
yeux et la fais rouler dans ma bouche,
dégageant des gemmes polies, de formes
et de couleurs diverses. Ce ne sont plus
dès lors les mots de la tribu, mais les tiens,
mystérieuse correspondante à la parole rare et
au verbe élégant. M'apprendras-tu, un jour, le secret
de leur éclat ou bien le tairas-tu pour mieux m'en envoûter ?