Je sais peu de choses de ma grand-mère
maternelle. Moins encore de sa jeunesse
à Mahon. Elle dessinait et herborisait dans
les environs avec son père cordonnier.
Un papier épais, signé par le maire d'alors,
atteste qu'elle y fut institutrice voici cent ans.
Et c'est tout. Ou presque. Alors quelle joie
que de passer devant la devanture d'un
magasin à l'enseigne de la Fantaisie.
Elle avait treize ans quand il ouvrit ses portes.
Y rêva-t-elle d'un foyer propret ? Ou de Paris
dont châtoyaient les tissus et les nappes ?
Je ne sais. Mais d'embrasser l'enseigne
du regard me donne l'illusion, comme de
fantaisie, de sentir dans la nuque un peu
de cette Cologne dont elle frottait ses joues.